Conformément aux promesses d’AMD – et à nos attentes ! – le Ryzen 6800U est bien la puce (presque) parfaite. Un processeur à la fois économe en énergie en mobilité, puissant pour les tâches du quotidien et intégrant une puce graphique capable de lancer tous les jeux sans exception. De quoi transformer n’importe quel ultraportable en petite machine de gaming.
Après avoir terminé le test du PC Asus Zenbook S 13 OLED, nous sommes enfin en position de vous l’affirmer : le Ryzen 6800U est (un peu) le meilleur processeur du monde. Suffisamment puissant, économe en énergie, il a peu de défauts. Mais surtout, il change la donne en matière de 3D avec sa puce Radeon 680M intégrée. AMD l’avait promis lors de l’annonce de sa puce en janvier dernier : les gains des performances graphiques sont importants. Ils peuvent effectivement aller jusqu’à +100% par rapport aux générations précédentes de CPU (Ryzen 4000 et 5000) qui exploitaient la vieillissante architecture Vega. Un saut de performances qui change littéralement tout pour les machines cibles de ce genre de puce : les PC ultraportables.
A lire aussi : Ryzen 6000 Mobile : AMD joue son atout graphique RDNA2 pour dominer Intel dans les PC portables (janvier 2022)
Jadis uniquement taillés pour être endurant sous Word et en surf sur le Net, les ultraportables se sont étoffés ces dernières années. Les écrans sortent du sempiternel 16/9e, l’équipement s’améliore avec des webcams 1080p, le clavier et le touchpad font l’objet de plus en plus de travail. Mais les performances 3D n’étaient jamais leur fort. Et pour cause : impossible de rajouter une puce Nvidia ou AMD dédiée. Avec une enveloppe thermique allant de 15 W à 35 W maximum, aucun GPU dédié n’existe pour seconder des CPU qui consomment (et dissipent) déjà toute cette énergie. Le vent a commencé à tourner en 2020 avec les Ryzen 4000, dont le Ryzen 4800U était le fleuron. Intel a riposté avec son GPU Xe, intégré aux Core de 11e et 12e génération. Mais AMD enfonce le clou avec ses Ryzen 6000 grâce à un rapport performances/efficacité inédit.
RDNA 2 et la Radeon 680M changent la donne
Depuis l’apparition des ultraportables, nous avons écrit un nombre incalculable de fois cette phrase : « S’il est léger et endurant, la partie graphique de son processeur mobile ne pourra pas lancer les jeux 3D les plus gourmands ». Pour la première fois de l’histoire, cette phrase est enfin fausse grâce au PC d’Asus dont nous vous avons parlé en début d’article, le Zenbook S 13 pour ne pas le renommer.
Certes, des puces intégrées comme la Radeon Vega 8 (Ryzen 4000 et 5000) et autres Intel Xe (Core 11e/12e Gen) permettaient déjà de jouer à la plupart des jeux. Mais pas toujours dans des conditions acceptables, les titres les plus exigeants comme Cyberpunk 2077 étaient hors de portée de ces puces. Car ils étaient à la limite, voire en dessous du vraiment jouable (20 i/s et moins).
La Radeon 680M intégrée au processeur d’AMD change la donne. Les 12 unités d’exécution RDNA 2 sont, ne mâchons pas nos mots, une merveille d’efficacité. AMD a eu le temps de se faire la main, puisque c’est lui le premier à avoir développé des APU, combinant CPU et GPU. Et ses clients s’appellent Sony (PlayStation 4 et 5), Microsoft (Xbox One et Series) ou encore Valve (Steam Deck). Ce PC au format console portable est le cas d’usage le plus proche. Faire du CPU et GPU, AMD sait très bien le faire. Mais pour combiner les deux, AMD est un champion.
Pour la première fois depuis que nous testons des ultraportables à 01net.com, une de ces machines a pu lancer tous les jeux que nous lui avons soumis. Et les exécuter de manière jouable, c’est-à-dire à plus de 30 images par seconde. Parfois avec des réductions de définition et de détails, mais toujours avec un joli rendu et un débit de trames suffisants.
Sur les titres les plus anciens, comme Skyrim ou Doom (2016), le 1920 x 1200 pixels passe crème avec un niveau de détails corrects. Et des framerates de plus de 60 fps peuvent être atteints pour les joueurs nerveux. Du jamais vu pour cette puce qui se permet, en plus, d’être super économe en énergie grâce à l’excellente architecture Zen 3. Et avec plus de 14h d’autonomie en usage classique (hors jeu et lecture vidéo donc), le Zenbook S 13 OLED est en plus l’une des machines les plus endurantes de nos bancs de tests !
Pas de Thunderbolt (parce qu’AMD à d’autres chats à fouetter ?)
Une des raisons pour lesquelles le 6800U n’est pas parfait (ou plutôt « complet ») provient, tout d’abord, de l’absence du standard Thunderbolt. Un genre de « super USB » au format USB-C qui envoie jusqu’à 40 Gbit/s. Capable, notamment, de gérer des GPUs, stations externes et écrans de manière très efficace. Cette absence de toutes les plates-formes d’AMD est à 100% à mettre sur son dos. Intel ayant libéré les redevances du Thunderbolt 3 – pour le 4, c’est un peu moins clair – n’importe qui peut désormais intégrer le protocole sans bourse délier.
Développant de nombreuses lignes de produits et subissant des délais de développement de plus en plus compressés, AMD est obligé de faire des choix. Et implémenter un tel contrôleur au sein de ses puces n’est pas non plus une tâche triviale. Mais son manque nuit à l’écosystème, ce d’autant plus que vu la performance de ses puces mobiles, les boîtiers externes à carte graphique intégrés commencent à avoir du sens – surtout à un moment où le prix des cartes graphiques, justement, commence à baisser.
Mais plus que la prise Thunderbolt, ce que nous reprochons à ce processeur 6800U, c’est sa… rareté !
Ryzen 7 6800U : pourquoi cette puce est-elle si rare ?
Les voies des chaînes d’approvisionnement sont difficilement pénétrables et il nous est assez difficile de savoir pourquoi cette puce est finalement assez dure à trouver. S’agit-il d’un souci de prix ? A priori pas, le modèle Asus que nous avons testé est à 1 500 € ce qui est dans la tranche basse des ultraportables de luxe que nous testons. AMD a-t-il du mal à produire ses puces ? Ou bien a-t-il mis ailleurs la priorité des lignes de production qu’il paye à TSMC ? Impossible d’avoir des sources, ce genre d’information faisant partie du spectre du « secret industriel », à moins d’avoir un insider ou qu’AMD ait intérêt à communiquer, vous le ne saurez jamais.
Les équipes ventes et marketing d’Intel font-elles un travail pour contrer AMD ? Assurément, mais il est généralement assez difficile de dresser les contours légaux ou illégaux. Intel ayant déjà été condamné pour pratiques anti-concurrentielles, il est assez peu probable qu’ils jouent à des jeux « sales ». Mais l’équipe des « bleus » sait faire des contrats de plates-formes alléchants, aide au développement des machines, à la pub, à la distribution, etc. Bref, Intel sait faire un travail au-delà de la simple production de puce. Et ça peut (grandement) changer la donne. Si AMD a fait des efforts dans les domaines de l’accompagnement du développement de machines autour de ses puces, elle n’a pas encore l’expérience (ni les ressources) de l’éternel champion.
Les pistes pour les processeurs du futur (et AMD a l’avantage)
Que cela soit intrinsèque à leur structure interne ou à la façon dont elles sont implémentées, les différentes architectures de puces ne se comportent pas de la même façon. Qu’on parle de CPU ou de GPU, les différentes technologies ne sont pas égales selon qu’elles sont intégrées à des puces basses ou haute consommation. Ainsi, certains GPU se comportent très bien à bas wattage et d’autres mieux quand ils sont poussés plus haut. Dans le cas de RDNA2, commun à la fois à la puce Aerith du Steam Deck et à ce Ryzen 7 6800U, des tests ont montré qu’en dessous de 12 W, le GPU du Steam Deck est plus puissant. Mais il perd en superbe et se fait largement distancer par le 6800U au-delà de 15 W.
À ce jeu, AMD est le meilleur. Et non seulement il l’a prouvé ces derniers temps, mais en plus, il a de l’avance… qu’il va garder un temps. Car si Intel est revenu de loin et lance, pour la première fois de son histoire, des cartes graphiques dédiées de qualité, il est bien le challenger en matière de graphique. Pire, on, sait déjà que la déclinaison mobile de ses Core de 13e génération intégrera la même architecture Xe que les 11e et 12e génération de Core. Avec un potentiel de progrès marginaux. C’est uniquement à partir des Core de 14e génération qu’Intel lancera une nouvelle génération de puce graphique intégrée. Pour l’heure, AMD a donc de la marge avec RDNA 2 qui offre entre 50% et 100% de performances en plus par rapport à Vega 8 (et donc Xe, qui sont peu ou prou à égalité). Un RDNA 2 parfaitement maîtrisé qui va ainsi continuer de dominer la 3D des puces graphiques pendant au moins 18 mois. Avant potentiellement de laisser sa place au RDNA 3 fraîchement annoncé.
Ce qu’il y a à espérer ? Deux choses : des puces qui restent à TDP constant – entre 15 et 28 W – pour toujours repousser plus loin les performances des PC ultraportables. Et passer en 1080p à Cyberpunk par exemple ! Mais aussi et surtout un travail de maintien des performances du Ryzen 7 6800U à moindre consommation énergétique. Pour que le prochain Steam Deck soit non pas nécessairement plus puissant, mais plus endurant. Pour produire des puces à 10-15 W encore plus endurantes et surtout plus faciles à intégrer dans des machines encore plus fines. Qu’il s’agisse de PC, ou de « PC/Console » comme les machines chinoises d’AYA par exemple. Car après avoir joué sur l’Asus Zenbook S 13, à Doom à plus de 60 images par seconde, on se surprend à se dire « ça y est, cette performance me suffit pour un ultraportable ». Ce qu’on veut, ce n’est pas plus de fps désormais : c’est moins de bruit et encore plus de batterie.