Une étude publiée, jeudi 25 mai, par l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) est venue mettre un coup de projecteur sur un phénomène connu pour être en pleine expansion. Selon les résultats de cette enquête menée par Médiamétrie, 2,3 millions de mineurs ont consulté des sites pornographiques en 2022, un chiffre en hausse de 36 % en cinq ans. L’Arcom, chargée par la loi de protéger les mineurs face à ces images, a constaté « une consultation de masse des sites pornographiques par les mineurs », qui se fait « essentiellement sur les smartphones, c’est-à-dire hors du regard parental ».
Les résultats de cette étude réalisée en France sur 25 000 panélistes mettent en exergue un autre élément : le très jeune âge des mineurs en question. D’après les données de l’enquête, 51 % des garçons de 12-13 ans regardent des sites pornographiques chaque mois, et 21 % des garçons de 10-11 ans. La fréquentation est bien moindre pour les jeunes filles.
Diane Saint-Réquier est éducatrice et formatrice en santé sexuelle depuis dix ans. Dans des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux par France.tv Slash, elle répond aux questions des internautes sur la santé, les sexualités et les identités. Mme Saint-Réquier anime également des séances d’éducation sur la vie affective et sexuelle auprès de collégiens et de lycéens en Ile-de-France. Dans un entretien au Monde, elle revient sur la nécessité d’allier l’éducation à la sexualité à l’éducation aux médias.
L’exposition d’adolescents de plus en plus jeunes à des contenus pornographiques en ligne fait naître un certain nombre d’inquiétudes, tant du côté des parents que des autorités. D’après votre expérience de terrain, diriez-vous que c’est un phénomène dangereux ?
« Chiffres alarmants », « situation inquiétante »… Ce ne sont pas des termes que je reprendrais à mon compte. Les mineurs accèdent à la pornographie très facilement et de manière massive, c’est une réalité. Mais il faut d’abord comprendre ce qui se joue autour.
Tout d’abord, pour les garçons, consulter des contenus pornographiques est une attente de genre. C’est-à-dire que dans les étapes de la construction de la sexualité d’un jeune homme, le fait de regarder de la pornographie et de se masturber (les deux sont très liés) est quelque chose qui est attendu de lui socialement. Sur le terrain, lors des animations, les garçons sont d’ailleurs les seuls à s’exprimer sur le sujet, à sortir des références de noms d’actrices ou des noms de site, à se faire des blagues dans leur groupe de copains… Il y a une connivence masculine sur le sujet.
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