Le Web 2.0 et la naissance des réseaux nous ont offert à tous la possibilité de publier des contenus, de s’exprimer et de partager avec d’autres. Ces nouveaux supports d’expression directe sont une véritable révolution pour la liberté d’expression des citoyens, pour leur liberté de communication et d’information. Toutes les sociétés civiles s’en sont emparées. Dans ce nouvel espace public numérique, journalistes, experts et politiques n’ont plus le monopole de la parole, de la production et de la diffusion de l’information. Devenus tous médias, nous avons tous la capacité de produire et de diffuser de l’information.
Pourtant, le constat posé est paradoxal, il est celui d’un espace informationnel numérique plus large mais moins démocratique, avec une concentration des pouvoirs entre les mains des Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft), plus puissants économiquement et financièrement que certains Etats. Leur hégémonie dans les industries médiatiques et culturelles constitue une menace pour notre souveraineté culturelle, une menace pour nos libertés et le pluralisme des informations et des opinions.
Ces géants du numérique se sont imposés en s’appropriant les caractéristiques des médias de masse, devenant sources de contenus, relais et centrales d’information, capteurs de manne publicitaire : Facebook est la première plate-forme d’accès à l’information, YouTube la première interface audiovisuelle des moins de 30 ans et Amazon la plus grande bibliothèque au monde. Ils suivent une seule logique, celle du profit, mettant hors-jeu le citoyen bien informé pour lui préférer un consommateur bien aiguillé.
Le big bang médiatique auquel on assiste s’inscrit de surcroît dans un contexte de déconsolidation de nos démocraties qui se traduit notamment par une perte de confiance dans les institutions, dont les médias, et une réelle défiance à l’égard des journalistes : 46 % des Français pensent que la démocratie fonctionne mal, 29 % que les élections sont faussées et 79 % sont favorables à la mise en place d’un contrôle de véracité de ce que publient les médias (Reuters Institute Report, 2022).
De la défiance aux extrêmes
Dans ce nouvel espace informationnel numérisé, les règles entre le respect des libertés publiques et l’ordre public tardent à se mettre en place : désinformation, polarisation des opinions, enfermement informationnel… Dans une société où les internautes accordent de plus en plus de valeur à la recommandation issue d’experts ou d’amis plutôt qu’aux analyses des journalistes, la défiance risque de se transformer en arme de propagande politique au service des extrêmes.
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