Acceptez-vous d’être ciblé par des publicités personnalisées ou préférez-vous payer 10 à 15 euros par mois ? C’est le choix que Meta envisage de présenter d’ici quelques mois aux utilisateurs européens de Facebook et Instagram, aujourd’hui gratuits : la maison mère des deux réseaux sociaux a présenté un projet d’abonnement payant aux autorités européennes, selon plusieurs articles de la presse américaine.
Cette offre permettrait d’utiliser les services sans voir de publicité. Elle coûterait, selon le Financial Times, environ 10 euros par mois (ou 13, pour la version mobile, afin de compenser la commission prélevée par les magasins d’applications d’Apple et de Google). Le Wall Street Journal parle, lui, de 14 dollars par mois (13,30 euros) et de 17 dollars (16,20 euros) pour l’accès à la fois à Facebook et à Instagram.
Proposer un abonnement rompt avec les habitudes de l’entreprise de Mark Zuckerberg. Mais, contrairement aux apparences, cette idée n’est pas le signe d’un changement de stratégie commerciale. « Meta croit aux vertus des services gratuits financés par les publicités ciblées. Toutefois, nous continuons à explorer des options pour nous assurer que nous nous conformons aux exigences des régulateurs », réagit un porte-parole de l’entreprise.
Motivation juridique
En effet, la motivation immédiate de l’entreprise est d’abord juridique : l’abonnement a été présenté par Meta à la Commission européenne et à l’autorité de protection des données d’Irlande (où est installé son siège européen) comme une solution de mise en conformité avec le règlement général sur la protection des données (RGPD) européen.
Pour se conformer à ce texte appliqué depuis 2018, Meta a estimé qu’il lui suffisait de présenter aux internautes des conditions d’utilisation révisées. L’acceptation de ce long contrat valait, selon elle, accord pour recevoir des publicités ciblées. Mais l’association de défense de la vie privée Noyb a porté plainte, afin de tenter d’imposer à Instagram et Facebook de recueillir le consentement exprès de leurs utilisateurs. Et, début 2023, l’autorité de protection des données irlandaise lui a donné raison : elle a infligé une amende de 390 millions d’euros à Meta et l’a sommée de changer ses pratiques. En juillet, la pression sur l’entreprise s’est encore accrue quand la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a, dans une autre affaire, estimé que le consentement était obligatoire.
Sur la défensive, Meta ne s’est jamais avouée vaincue. « Les décisions n’imposent pas le recueil du consentement », déclarait la société en janvier, assurant qu’une « variété d’autres bases légales [était] possible ». Proposer un abonnement payant serait pour Meta une porte de sortie. L’entreprise s’appuie notamment sur une petite précision qui ne lui a pas échappé dans la décision de la CJUE : la cour y écrit qu’un service sans publicité ciblée doit être proposé, « si besoin pour un prix approprié ».
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