Depuis dix ans, les acteurs publics et privés ne sont pas restés dans l’ignorance ou dans la contemplation. Et pourtant, seize millions de Français se disent éloignés du numérique, c’est-à-dire non équipés ou en grande difficulté avec les différents usages du numérique. Cela représente une proportion plus importante que chez la plupart de nos voisins européens, la France étant au douzième rang de l’Union européenne en matière de compétences numériques élémentaires.
Tout comme l’illettrisme, l’illectronisme est devenu un facteur d’exclusion majeur, dans un contexte de numérisation de l’ensemble de l’économie, de tous les secteurs de production, des systèmes d’échange et des modes de consommation. La technologie s’impose aussi comme une ressource irremplaçable pour l’accès aux services essentiels (e-administration, e-commerce, e-learning, e-santé, etc.).
Depuis le milieu des années 2000, la démocratisation des outils numériques a pourtant été spectaculaire. En 2019, 86 % de la population française est connectée à domicile (contre 31 % en 2003), et c’est le cas de 85 % des ouvriers (contre 21 % en 2003) et 96 % des cadres (contre 66 % en 2003). Le smartphone, plus facilement adopté par les foyers les plus modestes que l’ordinateur, est aujourd’hui le mode de connexion à Internet le plus utilisé.
Les enjeux relatifs aux compétences et aux pratiques numériques
Les inégalités d’accès au matériel sont avant tout économiques. Toutefois, c’est en matière d’usage que les disparités restent les plus importantes, en particulier auprès des foyers les plus modestes et des non-diplômés. Dans le cadre des démarches administratives ou professionnelles, de plus en plus dématérialisées, ce sont ceux qui ont le plus besoin de ces services qui rencontrent le plus de difficultés. On assiste ainsi à une situation de « double peine » pour ces publics déjà fragilisés.
Longtemps centrées sur l’accès aux équipements, les actions en faveur de l’inclusion numérique se sont peu à peu élargies pour prendre en compte les autres enjeux relatifs aux compétences et aux pratiques numériques. La stratégie nationale pour un numérique inclusif, lancée en 2018 et renforcée en 2020 dans le contexte de crise sanitaire, s’est notamment concrétisée par le recrutement de quatre mille conseillers numériques, par la diffusion de « pass numériques » donnant accès à des ateliers ou des formations, ou encore par le lancement de la plate-forme Aidants Connect, qui permet aux aidants numériques de réaliser des démarches administratives en ligne pour le compte de particuliers.
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