Hellblade II », entre saga viking et voyage intérieur

Hellblade II », entre saga viking et voyage intérieur


Sept ans après un premier opus qui avait intensément secoué le monde du jeu vidéo indépendant, Senua nous revient dans Hellblade II. Nous avions laissé notre guerrière picte au fin fond des brumes des îles Orkney, tout au nord de l’Écosse. Dans l’enfer de la mythologie nordique, elle traversait le royaume des morts pour retrouver son amant disparu. La voici donc de retour dans un deuxième chapitre, lancée en pleine chasse aux géants, des humanoïdes monumentaux et terrifiants qui jalonnent les plages sous une pluie battante.

L’épopée, toujours aussi linéaire, est à nouveau ici traversée par de longues phases de combats gentiment désuètes (les ennemis font la queue pour vous attaquer un par un) qui valent surtout pour l’impact des coups, sur le  ressenti des chocs et de la chair pénétrée par les lames d’acier.

Mais ce n’est pas par ses affrontements qu’Hellblade brille de son éclat sombre. Si le jeu vidéo n’est pas toujours très à l’aise ou souvent caricatural dans son traitement des troubles psychologiques, l’illusion visuelle et auditive sont encore une fois la grande affaire de cette saga viking.

Rune de l’âme

C’est notamment par ses énigmes qu’Hellblade II creuse plus encore la mise en scène des troubles de perception de Senua. Il s’agira principalement d’y retrouver des formes de caractères runiques cachés dans le paysage, de trouver la bonne perspective. Un morceau d’une toiture combinée à un bout d’échelle, observés depuis une plateforme en hauteur, forment par exemple ici une rune en forme de K – une clef pour avancer. D’autres énigmes altèrent directement les décors, qui se forment alors alors de véritables labyrinthes.

Mais c’est principalement par le sound design que les déformations de la perception de la réalité et les troubles mentaux de Senua se font ressentir. L’utilisation du casque audio s’impose tant l’atmosphère binaurale à 360 degrés provoque tout à tour  frémissements et angoisses. Les voix intérieures de la sauvageonne nous enserrent, dansent autour de nous tandis que l’on progresse. Entre murmures et hurlements, les échos qui nous harcèlent ne rendent pas toujours l’expérience agréable, mais là est leur force : la psychose ne doit pas être aimable. Dans une éreintante cacophonie, la progression de Senua est ainsi évaluée et commentée par une foule de consciences brouillées.

Graphiquement, le modeste studio britannique Ninja Theory réalise encore des prouesses, faisant plus que jamais la part belle à l’immersion. Certains décors extérieurs sont somptueux, d’une noirceur impeccable, ainsi que le visage grimaçant et endolori de Senua, héroïne atypique de sang baignée. Ce photoréalisme sert le sentiment, omniprésent, d’une aventure éprouvante. Ainsi, un motif revient ainsi et ce, dès le plan-séquence qui fait office d’ouverture, alors que Senua est saisie rampante, filmée au plus près de son corps qui progresse laborieusement dans la boue.

Qu’il s’agisse de falaises ou de créatures géantes, des ombres menaçantes planent sur le destin de Sensua.

Sur les côtes

Car si Hellblade II n’explore pas tant que ça la psychose qu’il met pourtant si intensément en scène, il nous propose un chemin escarpé, serpentant, un chemin de croix en fait, vers une possible guérison. Pleine d’aspérités, de détours, d’hallucinations et de troubles, la route vers le soin est semée d’embûches. Senua, traversée par de profondes crises schizophréniques, victime de troubles dissociatifs de l’identité, chemine le long des côtes, en lutte intérieure pour ne pas perdre complètement contact avec la réalité. Malgré sa courte durée de vie (environ huit heures), la faute à quelques combats répétitifs ou des énigmes parfois étirées en longueur, Hellblade II n’amuse pas toujours des masses. Mais il produit certaines des images parmi les plus marquantes de l’année, comme cette sublime géante recroquevillée sur le sol et dont on vient de percer à jour l’insondable douleur. La gueule dans la boue, à la recherche du soleil.

Lancé dans une randonnée mystique et psychotique, il vous faudra traverser nombre de chemins rocailleux pour longer les côtes écossaises.

L’avis de Pixels

On a aimé :

  • la compagnie (même si parfois douloureuse) de Senua ;l’ambiance psychotique et nordique ;
  • une mise en scène qui prend aux tripes.

On a moins aimé :

  • des combats répétitifs et peu inventifs ;
  • certaines énigmes vues et revues ;

C’est plutôt pour vous si :

  • vous aimez flâner sous la pluie le long des côtes écossaises ;
  • la mythologie scandinave n’a plus de secret pour vous

Ce n’est plutôt pas pour vous si :

  • vous n’avez pas les nerfs solides ;

La note de Pixels :

6 des 9 mondes de la mythologie nordique

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