les médias européens pris au piège

les médias européens pris au piège


Six vidéos d’une dizaine de minutes chacune, produites de façon professionnelle, avec le logo de Netflix et une – fausse – voix de Tom Cruise : dimanche 2 juin, un rapport de Microsoft a mis en avant la publication, déjà repérée par le site spécialisé Provereno (« vérifié »), d’un énième faux documentaire prorusse, s’attaquant ici aux Jeux olympiques de Paris 2024.

« Enième », parce qu’il ne se passe pas une semaine sans que des faux sites d’information francophones relaient de nouveaux contenus attaquant le soutien français à l’Ukraine, l’Elysée, ou encore attisant les braises de la situation politique et sociale du pays. A coups de vidéos, mèmes ou d’interviews de personnalités, les différentes infrastructures techniques soupçonnées d’être opérées depuis l’Est de nos frontières ont, depuis 2022, été mises en surrégime en Europe et en France. A commencer par Doppelgänger, un vaste réseau de faux sites, comptes Twitter, Facebook ou encore TikTok, actif depuis plus d’un an et demi et attribué à des sociétés de marketing russes agissant vraisemblablement pour le compte du Kremlin.

Une constante se retrouve cependant dans tous ces contenus en ligne : leur relative inefficacité. En étudiant de près certains chiffres, on peut en effet largement relativiser l’ampleur réelle de la population touchée par ces campagnes, dont les messages recueillent très peu de vues et encore moins de partages et de commentaires.

Le film usurpant la voix de Tom Cruise n’a ainsi eu quasi aucune audience avant d’être supprimé de YouTube. Les comptes Twitter de Doppelgänger, largement identifiés comme des spams par les algorithmes du réseau social, sont, quant à eux, enterrés dans les fils d’actualité. Sur Facebook, le rythme de publicités diffusées par le réseau de faux sites est en baisse. Pour contourner les filtres mis en place par Meta, les auteurs des messages prorusses ont même dû « dégrader la qualité » des publications, en y ajoutant par exemple des fautes de syntaxe les rendant illisibles, expliquait récemment David Agranovich, directeur de la lutte contre les menaces de Meta, lors d’une conférence de presse.

Pas de mauvaise publicité

En réalité, c’est de plus en plus sur les médias classiques que comptent les désinformateurs russes. Avec une stratégie, parfaitement assumée, qui les pousse parfois à signaler eux-mêmes aux grands médias les faux contenus produits par la propagande du pays.

L’ONG Reset et l’entreprise de cybersécurité Check First décortiquent cette mécanique dans un rapport fourni, publié mardi, qui développe une précédente enquête de l’Agence France-Presse et du collectif d’opposants russes Antibot4Navalny : au moins huit cents rédactions, élus et chercheurs ont été sollicités par des comptes prorusses pour les inciter à se pencher sur des faux favorables au Kremin. L’objectif, double, est de saturer les ressources des universités et des médias tout en cherchant à attirer l’attention du public sur ces intox.

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