La course effrénée à l’IA va-t-elle se heurter de plein fouet au RGPD ? Dans un post de blog publié à la fin du mois de mai, la maison mère de Facebook et Instagram annonçait une évolution de sa politique de protection des données personnelles.
L’objectif de ce changement est de permettre à Meta de collecter les données publiées par ses utilisateurs sur ses différents réseaux sociaux et application. Une collecte afin de les utiliser pour le développement de fonctionnalités basées sur l’IA.
Parmi les exemples cités par Meta, la possibilité de générer de nouveaux stickers pour agrémenter les stories et les conversations. Mais aussi l’entraînement de son modèle Meta AI.
Intérêt légitime
Meta promet de développer ses IA de façon « responsable ». Surtout, l’entreprise assure avoir pris en compte les exigences liées au règlement européen sur la protection des données personnelles (RGPD). La société explique vouloir collecter l’ensemble des données publiées publiquement par les utilisateurs de ses réseaux sociaux, comme les statuts, les photos publiques et leurs légendes. Mais elle assure qu’elle ne collectera pas les informations provenant des conversations privées.
Concernant le cadre légal de cette collecte, Meta explique qu’elle se justifie comme relevant de « l’intérêt légitime » de la société. De quoi lui épargner la nécessité de demander le consentement des utilisateurs concernés.
Meta offre la possibilité pour ses utilisateurs qui le souhaitent de refuser la collecte. Pour ce faire existe un formulaire accessible sur son centre de protection des données.
Plaintes en cascade
L’initiative n’est pas du goût de tout le monde. La semaine dernière, l’association Noyb annonçait ainsi avoir déposé des plaintes visant Meta dans 11 pays membre de l’union européenne. L’organisation de défense des libertés numériques, fondée par l’autrichien Max Schrems, conteste « l’intérêt légitime » invoqué par la société américaine.
L’association rappelle que Meta a déjà tenté de s’appuyer sur cet argument pour justifier la collecte automatique, sans recueil du consentement, des données de ses utilisateurs. Et ce à des fins de publicité ciblées. La cour de justice européenne s’était alors prononcé en défaveur de Meta.
Dans la nouvelle politique annoncée par Meta, les utilisateurs qui souhaitent s’opposer à la collecte de leurs données ont jusqu’au 26 juin pour remplir le formulaire. La possibilité d’objecter est rendue d’autant plus difficile que l’accès au formulaire est complexe.
Procédure d’urgence
Dans ses plaintes, l’association demande aux différentes autorités de protection des données européennes de mettre en place une procédure d’urgence au sens de l’article 66 du RGPD.
Cette procédure permet à une autorité de protection des données de mettre en place des mesures provisoires pour une période de trois mois. Elle permet également de demander une décision d’urgence auprès du comité européen de protection des données afin d’étendre la décision au reste des pays de l’UE.
L’association Noyb explique avoir choisi de se tourner vers les différentes autorités européennes après avoir découvert dans la presse que l’autorité irlandaise, dont Meta dépend en Europe, avait approuvé l’approche de Facebook.
La DPC irlandaise a ainsi négocié la mise en place de certains garde-fous comme la création d’un formulaire d’objection et la notification des utilisateurs européens concernés.