Lancé en 2013, le plan France Très Haut Débit (FTHD) vise à améliorer la couverture numérique des territoires par étapes. En 2020, il s’agissait de garantir à tous un accès à un débit correct, supérieur à 8 Mbit/s, puis en 2022, de donner accès à tous au très haut débit (supérieur à 30 Mbit/s). Puis, s’est ajoutée une nouvelle ambition souhaitée par le président Macron : généraliser la fibre optique sur l’ensemble du territoire d’ici 2025.
Ce dernier objectif ne sera pas atteint. Au 31 mars, 87 % des locaux du territoire national – soit 38,7 millions de foyers – sont éligibles au très haut débit selon le décompte de l’Arcep, le régulateur du secteur des télécoms. Il reste environ 5,5 millions de locaux à rendre raccordables. La marche est d’autant plus haute qu’une partie des raccordements restant à réaliser sont dits complexes.
Ces raccordements complexes impliquent la réalisation de travaux au domicile de l’abonné, et à sa charge, comme creuser une tranchée sur son terrain, casser une dalle dans le garage ou déboucher un fourreau. Alors que le réseau cuivre, qui supporte la technologie ADSL, va progressivement s’éteindre d’ici 2030, il devient urgent de procéder à la réalisation de ces travaux de génie civil.
Entre 1,1 et 1,8 million de raccordements complexes à effectuer
Dans un rapport commandé le 30 octobre 2023, finalisé en avril 2024 mais publié seulement le 4 novembre dernier, le Conseil général de l’économie (CGE) évalue « en s’appuyant sur les données existantes, et en retenant une approche large » le nombre de raccordements complexes en domaine privé restant à réaliser entre 1,1 et 1,8 million, représentant un coût total compris entre 640 et 1 050 millions d’euros.
Une fourchette haute qui se rapproche de celle de l’Observatoire de la transition numérique des territoires, conçu par InfraNum avec la Banque des Territoires et l’Avicca.
Pour ce dernier, ces raccordements complexes nécessiteront un investissement pouvant s’élever jusqu’à 1,3 milliard d’euros.
Jusqu’à 1 500 euros d’aide
La CGE esquisse plusieurs scénarios pour le financement de ces raccordements complexes. Il convient tout d’abord de limiter l’effet d’aubaine, c’est-à-dire la prise en charge par un dispositif d’aide de dépenses qui auraient de toute façon été effectuées par les personnes concernées.
Le rapport préconise un soutien financier privilégiant les propriétaires les plus modestes et les TPE. Plafonnée à 1 500 euros, cette aide pourrait être conditionnée par les ressources du foyer. Elle serait versée en totalité pour les bénéficiaires des minimas sociaux. A l’inverse, le soutien serait limité pour les propriétaires dont le quotient familial correspond aux deux premières tranches d’imposition. En revanche, la CGE écarte tout recours au crédit d’impôt, obligeant les particuliers à avancer les frais des travaux.
Les particuliers sont déjà éligibles au dispositif « Cohésion Numérique des Territoires » qui vise à renforcer l’accès au très haut débit pour les Français. Cette aide comprise entre 150 et 600 euros soutient financièrement l’installation et l’équipement en technologies sans fil (satellite, boucle locale radio et 4G fixe).
Impliquer les opérateurs et les collectivités
Il s’agit aussi d’impliquer le opérateurs télécoms qui, avec la migration du cuivre vers la fibre, sont déjà en contact avec les derniers abonnés à l’ADSL. Ce qui pourrait passer par la prise en charge des travaux « légers » de raccordement dont le coût inférieur à 200 euros. « Ce qui correspond très largement à leur pratique actuelle ». Ou bien de prendre en charge les 200 premiers euros des travaux lors des raccordements complexes.
Signé en mars, l’accord entre l’Etat et Orange envisage, par ailleurs, la création d’une entreprise, provisoirement nommée GCco, qui interviendrait dans le champ des raccordements complexes en domaine public, en prenant en charge la réalisation du génie civil nécessaire dans des zones où celui-ci n’existe pas. Le rapport envisage de demander à GCco ou à ses sous-traitants d’intervenir également dans le domaine privé.
Enfin, le rapport entend mettre à contribution les collectivités territoriales via une participation financière, directe ou indirecte, et en participant à l’information au public. Une dernière recommandation qui devrait faire bondir les dites collectives qui ont vu, avec le projet de loi de finances 2025, le budget du plan France Très Haut Débit amputé de moitié.