plongée dans la vague du soft power sud-coréen

plongée dans la vague du soft power sud-coréen


Livre. Pour ceux qui ne connaissaient pas la dimension addictive des séries sud-coréennes, ni leur succès hors frontières, le phénomène Squid Game – dont Netflix va diffuser la deuxième saison le 26 décembre – fut un révélateur. Records de visionnage en ligne dans de nombreux pays, rassemblements inopinés dans des espaces publics, regain d’intérêt pour le jeu enfantin du 1, 2, 3, Soleil… Cette série dystopique sur un jeu de massacre entre prolétaires organisé pour divertir quelques ploutocrates fut une démonstration supplémentaire du vibrant soft power sud-coréen.

En 2022, dans K-pop, soft power et culture globale (PUF), les sociologues Vincenzo Cicchelli et Sylvie Octobre exploraient déjà la hallyu, cette « vague sud-coréenne », à travers ses produits culturels les plus emblématiques, comme la musique K-pop. Dans leur nouvel ouvrage, Les K-dramas, ces séries qui font du bien (PUF, 208 pages, 19 euros), ils s’intéressent à ces séries, tel Squid Game, très populaires sur les plateformes de vidéos à la demande.

Pour tenter d’expliquer leur résonance auprès du public étranger et notamment occidental, et après visionnage d’une centaine de titres, les sociologues évacuent rapidement l’exotisme que ces productions aux genres très variés et perméables entre eux (romance, comédie, fantastique, thriller, fiction historique…) peuvent susciter. Ils ne s’appesantissent pas plus sur leur esthétique calibrée pour le succès commercial.

« Carte du savoir-aimer »

Les deux auteurs privilégient au contraire un angle d’analyse qu’ils estiment inédit : les K-dramas représentent « un idéal portant sur ce qui unit les individus ». « Ces séries dessinent une carte du savoir-aimer, écrivent une sorte de manuel du savoir-vivre avec les autres, une grammaire de l’inclusion des plus faibles. » Un option qui peut venir se substituer, donc, aux réalisations occidentales qui célèbrent le héros solitaire et développent « une vision pessimiste de l’individu ».

Sylvie Octobre et Vincenzo Cicchelli analysent en détail quinze séries à l’aune des thématiques sociales explorées par les scénaristes. Boys Over Flowers (2009) leur permet par exemple d’aborder la question des inégalités dans un couple, Business Proposal (2022) d’évoquer « l’invention d’un féminisme partagé » entre hommes et femmes. Quant à Mr. Sunshine (2018), il est l’occasion de revenir sur la résilience face à la modernisation et l’impérialisme. Minutieusement, les auteurs égrènent les indices d’émotions (une notion centrale de la pensée philosophique coréenne, expliquent-ils), de sincérité et d’authenticité nichés dans les liens que tissent les personnages.

Avec son extrapolation macabre du chacun pour soi pointant le cynisme et l’extrême violence du capitalisme moderne, Squid Game semble bien loin de cette « banalité du bien » défendue par les auteurs. Si elle fait figure d’« exception », cette série phénomène maintiendrait tout de même « centrales les topiques du lien et de la sincérité » grâce à d’ultimes gestes de bonté lors du dénouement.

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