Publicités sur critères politiques : le cas de X décortiqué

Publicités sur critères politiques : le cas de X décortiqué



Depuis la reprise en main de Twitter par Elon Musk, les recettes publicitaires du réseau social ont connu quelques difficultés.

Mais de nombreuses entreprises continuent d’utiliser le réseau social pour diffuser de la publicité ciblée, en sélectionnant des utilisateurs selon de nombreux critères.

Mais comme le montre une étude publiée aujourd’hui par l’association AI Forensics, les mots clefs utilisés pour cibler les utilisateurs du réseau sont parfois liés à leur orientation politique.

Transparence contrainte

L’association explique avoir étudié les mots clefs utilisés par différentes entreprises diffusant de la publicité sur le réseau social. En l’absence d’accès direct à l’API de X, le réseau social ayant coupé les accès réservés aux chercheurs, l’association s’est appuyé sur le service Ads Repository qui permet d’obtenir les données relatives aux campagnes publicitaires diffusées par certains comptes sur le réseau social.

La mise à disposition de cet outil est une des exigences de transparence issue du règlement européen sur les services numériques (DSA).

Cette méthode a permis à l’association d’étudier les critères de diffusion de plusieurs campagnes de publicité commandées par des entreprises et des organisations sur le réseau social. Et les chercheurs constatent que le recours à des critères « sensibles » au sens du RGPD, c’est-à-dire relatifs à l’orientation politique, religieuse ou sexuelle des personnes, est une pratique courante.

Termes exclus, termes inclus

Par exemple, les campagnes diffusées par le groupe Total Énergies au travers de son compte @TotalEnergiesGroup excluaient l’affichage des publicités aux utilisateurs ayant été associés à des figures politiques liées :

  • Aux partis écologistes ou à leurs alliés
  • Aux militants en faveur du climat
  • A certains termes associés à des religions

Les utilisateurs du réseau social associés à ces critères n’étaient donc pas exposés aux 86 campagnes de publicités diffusées par le groupe Total Energies sur X entre septembre 2023 et mars 2025.

A l’inverse, certains comptes comme celui du groupe chinois Shein ont diffusé en France des publicités ciblant des comptes spécifiquement associés par X à des termes politiques comme « Melenchon » ou « LFI ». Mais aussi des critères liés à la religion comme « Allah » et « dieu ».

HaveIBeenTargeted, pour comprendre le mécanisme

Outre ce rapport, l’association propose également un outil pour les internautes qui souhaiteraient savoir si des organisations ont spécifiquement ciblé leurs profils pour leurs campagnes publicitaires. Baptisé HaveIBeenTargeted, ce service propose aux internautes de partager l’archive de leurs données X/Twitter afin de permettre aux chercheurs de les analyser.

Comme l’explique Paul Bouchaud, chercheur de l’EHESS chargé de l’étude menée par AI Forensics, cet outil n’avait été utilisé que « dans un cercle restreint pour le tester ». Mais il explique que l’association « a développé l’outil en parallèle du rapport pour que chacun puisse avoir un aperçu de son ciblage. »

L’objectif est avant tout pédagogique, afin de permettre aux internautes de comprendre le fonctionnement du ciblage. Mais il a déjà permis aux chercheurs d’identifier certains comptes diffusant des publicités ciblées sur des critères politiques. Comme par exemple la marque de vêtement APER Mode dont les campagnes publicitaires visaient spécifiquement les internautes jugés proches des thèmes d’extrême droite.

Ciblage illégal

Dans son rapport, l’association se garde bien d’établir si le recours à ces critères constitue une entorse à la loi. Mais en Europe, le règlement sur la protection des données personnelles et le DSA interdisent effectivement le ciblage des internautes sur la base de ce type de données.

La Commission européenne en avait d’ailleurs fait les frais, après avoir utilisé X pour diffuser des campagnes ciblées excluant les internautes associés à des figures d’extrême droite.

Attaquée par l’association noyb sur ce point, la Commission avait été réprimandée par l’European Data Protection Supervisor, le gendarme des données personnelles des institutions européennes, en fin d’année 2024.



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