A Marseille, le fournisseur européen de services de datacenters Digital Realty a annoncé en décembre 2023 le lancement d’un nouveau projet de datacenter, baptisé MRS5.
Il vient s’ajouter aux quatre autres installations opérées par la société hollandaise dans l’agglomération.
Mais le projet fait face à des critiques de la part d’élus locaux et d’associations. Ils déplorent l’accaparement des ressources naturelles de la région pour le bénéfice d’acteurs privés. Et rappellent l’impact environnemental des installations de ce type.
Et au milieu coule une rivière
Le projet MRS5 porté par Digital Realty vise à installer sur le périmètre du grand port maritime de Marseille un nouveau datacenter de 12 000m² dont la livraison est prévue pour 2026. Ce projet constitue le cinquième datacenter opéré par Digital Realty dans l’agglomération marseillaise et deviendra le plus grand datacenter de la ville à son ouverture.
Il a a été officialisé en 2023, suite à un appel à projet lancé un an plus tôt par le port de Marseille pour l’exploitation d’un ancien silo à sucre, à l’abandon depuis 2015 et dont la destruction a débuté en janvier 2024.
Pour convaincre, Digital Realty a multiplié les efforts sur le coût écologique de cette installation. La société assure ainsi que MRS5 profitera « des meilleures pratiques mises en œuvre par Digital Realty en matière d’éco-responsabilité » et rappelle que cette nouvelle installation s’appuiera sur la technologie du River Cooling pour refroidir ses systèmes informatiques. Cette technologie vise à exploiter l’eau d’une ancienne galerie minière et permet selon les porteurs du projet d’assurer un système de refroidissement plus économe en énergie.
Inquiétudes et promesses
Mais les promesses de Digital Realty ne suffisent pas à faire taire les critiques. Plusieurs associations locales, des élus et des citoyens marseillais se disent inquiets, comme le rapporte le magazine le Meridional.
Dans une tribune signée par un collectif et intitulée « Le nuage était sous nos pieds », qui regroupe le collectif local des Gammares ainsi que La Quadrature du Net, ils estiment que « le « rivercooling » utilisé à Marseille par Digital Realty pour refroidir ses data centers, n’est rien d’autre que le détournement des eaux de qualité potable de l’ancienne galerie minière de Gardanne. Et ce pour un gain énergétique peu conséquent. Ils veulent « saisir la commission nationale du débat public pour ouvrir le débat sur les impacts de ces installations numériques ». Et ils appellent à la mise en place d’une « feuille de route stratégique pour rationaliser l’intégration des centres de données sur le territoire. »
Face aux accusations, le patron de Digital Realty France, Fabrice Coquio, défend dans la presse locale les efforts de son entreprise pour limiter l’impact écologique de son nouveau datacenter. Il évoque aussi l’investissement nécessaire pour la démolition et le désamiantage du silo à sucre présent sur le site. Il ajoute aussi que le projet promet de générer 500 emplois directs et indirects.
Guerre de chiffres
L’impact écologique des datacenters est un sujet houleux. Surtout que personne ne s’accorde sur la bonne manière de mesurer concrètement son ampleur. Les constructeurs de datacenter et les GAFAM publient régulièrement des données sur les émissions carbones de ces installations. Mais celles-ci sont critiquées pour l’utilisation de méthodologies présentant les chiffres sous un jour trop favorable.
Une étude publiée cette semainepar le quotidien britannique The Guardian montre ainsi que les émissions carbones des datacenters des principaux Gafam serait environ 7,6 fois supérieure aux chiffres avancés dans les rapports publiés par ces entreprises.
En France, une étude publiée en 2022 par l’Arcep et l’Ademe montrait néanmoins que le principal responsable de l’empreinte écologique du numérique est… la fabrication des équipements et terminaux (ordinateurs, tablettes, smartphones etc). Cela représente 65% à 90% de l’impact environnemental du numérique, quand les centres de données ne représentent que 4% à 22%