LA LISTE DE LA MATINALE
Les puristes sont souvent en quête d’équilibre sonore, mais certains amateurs de musique apprécient au contraire un rendu coloré : des basses plus présentes ou des aigus adoucis, par exemple. « Si vous prenez plus de plaisir ainsi, vous n’avez pas à vous sentir coupable », juge Justin Bacle, ingénieur du son et responsable de l’audio chez DXOMARK, une entreprise française qui évalue les performances des appareils électroniques.
Pour colorer le son à votre goût, l’idéal est d’utiliser un outil nommé « égaliseur », proposé dans les options de certains logiciels de lecture musicale. Il permet de modifier la quantité de basses, de médiums et d’aigus, en les dosant subtilement grâce à des curseurs. C’est beaucoup plus simple qu’il n’y paraît : les basses sont réglables avec les curseurs de gauche, situés sous la fréquence des 200 hertz (Hz), les aigus avec les curseurs de droite, situés au-dessus des 4 000 Hz. Quant aux médiums, les fréquences où résident les voix, ils se règlent avec les curseurs du milieu.
Voici les cinq principaux réglages qui pourraient vous plaire pour une écoute au casque, sur enceinte ou sur haut-parleurs. Pour les mettre en pratique, reportez-vous au mode d’emploi figurant en encadré.
• Basseux
C’est le péché mignon le plus universellement apprécié. « Monter les basses donne de l’impact, de l’énergie, du punch », juge Justin Bacle. Une coloration chaleureuse particulièrement appréciée sur la musique électronique et le rap. « On peut aussi tester ce réglage sur de la pop ou du rock », conseille Philippe, l’un des piliers du Forum-hi-fi.fr, où il porte le pseudo pda0.
Comment obtenir cette coloration sonore ? Sur l’égaliseur, il faut monter le volume des fréquences situées en dessous des 200 Hz. Sur un casque, on peut accentuer d’un cran supplémentaire les extrêmes graves, situés sous les 50 Hz. Cela compense l’absence d’impact physique des écouteurs – ils ne font pas vibrer les entrailles quand les basses sonnent fort, contrairement aux enceintes.
Attention, ces réglages sont réservés aux appareils fonctionnant loin de leur volume maximum. Mieux vaut éviter ce type d’égalisation sur un appareil constamment proche de 100 % : on poussera son électronique à ses limites, au risque de dégrader la qualité audio.
Attention encore à l’accentuation des basses sur des enceintes. Elle peut aggraver les problèmes acoustiques liés à la pièce d’écoute et nuire à la clarté sonore. Quand on utilise un égaliseur, il faut toujours être attentif aux conséquences sonores des nouveaux réglages, et vérifier que la musique sonne réellement mieux.
• Doux
Lorsqu’on combine des basses accentuées à des aigus atténués, le son devient moins agressif, plus rond, plus reposant. On peut apprécier ce réglage-là sur tout type de musique, mais il sonne particulièrement bien avec des titres des années 1960 et 1970.
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Concrètement, on augmentera les basses jusqu’à 250 Hz, puis on baissera les aigus à partir de 4 000 Hz. Ou mieux : pour préserver le naturel du son, on agira plus subtilement en « baissant de façon lente et régulière le niveau sonore depuis les basses jusqu’aux aigus », explique Philippe. « Concrètement, on dessinera une pente droite de 20 Hz à 20 000 Hz. »
L’écart de volume sonore entre les basses et les aigus sera compris entre 5 et 10 décibels. Les seniors entendant moins bien les aigus, ils auront tendance à préférer un écart plus faible, compris entre 3 et 7 décibels.
• Clair
Pour une meilleure intelligibilité de la musique ou des voix, on peut atténuer les basses. Dans certains cas, cela permet d’entendre plus clairement l’étagement des instruments d’un orchestre classique ou d’améliorer la clarté d’un podcast.
Pour ce faire, atténuez les fréquences situées sous les 150 Hz. « Ce conseil est surtout valable pour une écoute sur enceintes, car les pièces d’écoute ont souvent des problèmes acoustiques dans les basses fréquences nuisant à la clarté générale », juge Philippe.
Pour améliorer la clarté sonore, on peut encore agir sur les aigus, mais c’est un réglage plus hasardeux. Certains morceaux ou certains podcasts profiteront d’une augmentation du volume sonore au-dessus de 4 000 Hz, donnant un rendu plus « aéré » ; d’autres profiteront au contraire d’une baisse.
• En forme de V
« Quand on écoute sa musique la nuit, et qu’on réduit le volume sonore, on a l’impression que les basses et les aigus disparaissent », relève Philippe. L’explication est simple : plus le volume baisse, mieux l’oreille entend les voix – c’est une qualité qui nous vient de l’évolution.
A faible volume, on peut monter les basses et les aigus pour compenser : ceux-ci deviennent plus intelligibles. Au passage, on améliore l’équilibre sonore et le plaisir d’écoute. En pratique, on montera les fréquences situées sous les 500 Hz et celles situées au-dessus de 4 000 Hz, de façon progressive, afin d’obtenir sur l’égaliseur la forme d’un V.
A fort volume, l’oreille conserve une légère préférence pour les voix : on peut donc maintenir un réglage en V, mais en accentuant beaucoup moins les graves et des aigus. « Ça donne plus de présence, plus de puissance, juge Justin Bacle, un réglage intéressant pour la musique rock, le jazz moderne ou l’électro ». Cependant, si les graves et les aigus sonnent plus richement détaillés, les médiums peuvent être masqués, ce qui nuira à l’intelligibilité des paroles. En outre, l’accentuation des aigus pourra fatiguer les oreilles.
• Neutre
Choisir l’équilibre sonore, c’est respecter les choix créatifs des artistes. En outre, un son équilibré sera compatible avec n’importe quel type de musique : « Quand c’est neutre, tout passe », juge Philippe. C’est donc un réglage que recherchent beaucoup d’audiophiles.
Mais la neutralité est tout sauf facile à atteindre. Les écouteurs réputés pour leur équilibre sonnent en réalité très différemment en fonction des morphologies (tête, oreilles, conduits auditifs, etc.). Quant aux enceintes, les plus équilibrées sonnent différemment dans chaque pièce d’écoute.
Dans une pièce ne souffrant pas de gros problèmes acoustiques, on peut améliorer sensiblement la neutralité sonore de ses haut-parleurs en y investissant de longues heures et un peu d’argent. Mais, selon les experts interrogés, améliorer la neutralité d’un casque audio est beaucoup plus complexe pour le grand public.
L’égalisation, en pratique
Avant tout, vous aurez besoin d’un lecteur musical disposant d’un égaliseur. Si vous possédez votre collection de MP3 sur smartphone, optez pour le lecteur VLC (l’égaliseur est accessible depuis la page de lecture en pressant sur les trois petits points). Sur PC, préférez le lecteur d’AIMP, dont l’égaliseur est plus précis (accessible à droite du curseur de volume).
Certaines applications de streaming musical intègrent aussi un égaliseur, un peu sommaire toutefois. Celui de Spotify est accessible dans la rubrique « Lecture des préférences » (via l’icône « engrenage » sur la page d’accueil ou le raccourci CTRL + P sur PC), celui de Deezer depuis la page de lecture du titre (en pressant en bas à gauche sur l’icône symbolisant un haut-parleur). Apple Music ne donne pas accès aux curseurs de réglage mais à des réglages type « classique », « jazz », ou « hip-hop » (accessibles depuis les réglages généraux du mobile, à la rubrique « Musique »).
Baissez toutes les fréquences d’environ 7 dB
Comment pousser les curseurs adroitement ? Choisissez d’abord un titre que vous connaissez bien, riche en basses, en voix et en aigus. Sur l’égaliseur, commencez par baisser le niveau sonore de toutes les fréquences d’environ 7 décibels (dB), en poussant chacun des curseurs vers le bas.
Cette astuce vous permettra ensuite d’accentuer les fréquences de votre choix sans les faire passer dans le rouge, ce qui nuirait à la qualité sonore. Montez ensuite le niveau sonore général de votre smartphone ou PC de façon à compenser la perte de volume occasionnée.
Montez tous les curseurs nécessaires
Ciblez maintenant la fréquence qui vous intéresse, puis montez franchement son niveau sonore en poussant le curseur vers le haut afin de bien entendre l’effet de cette modification. Redescendez ensuite le curseur jusqu’à un niveau plus raisonnable, sonnant bien à votre oreille. En suivant la même méthode, montez tous les curseurs nécessaires jusqu’à obtenir satisfaction.
Evitez de monter au-dessus d’un volume maximal de 7 à 10 décibels. Faites confiance à vos oreilles : les cinq réglages indiqués plus haut partent d’un scénario idéal, supposant que votre casque ou votre enceinte sonnent de façon neutre et équilibrée. En pratique, c’est rarement le cas. Ecoutez attentivement chaque modification, et ajustez-la en fonction de vos observations.
Après être parvenu à un réglage satisfaisant, vérifiez qu’il reste valable avec d’autres titres musicaux. Si ça n’est pas le cas, faites des ajustements. N’hésitez pas à faire des captures d’écran de vos réglages ou à les prendre en photo pour les mémoriser. Dans l’idéal, vous devrez adopter un réglage différent pour chacun de vos casques, chacune de vos enceintes et chacun de vos haut-parleurs, car leur signature sonore a toutes les chances d’être sensiblement différente.