Le Health Data Hub a été une épine dans le pied pour de nombreux gouvernements successifs. Peut-être l’est-il plus encore aujourd’hui alors que les responsables politiques multiplient les appels à la défense de la souveraineté numérique.
Le 8 avril, lors des questions au gouvernement à l’Assemblée, Clara Chappaz n’a pas échappé au sujet.
Le déclencheur : la migration annoncée du projet européen Darwin sur Azure, pour s’aligner sur l’environnement technique du HDH.
Briser le monopole des entreprises de la Big Tech
Ce choix est dénoncé par le député Emmanuel Maurel pour des raisons juridiques, c’est-à-dire d’exposition des données au droit US, mais aussi pour des motifs économiques.
“Les entreprises françaises d’hébergement de données attendent impatiemment un texte qui brise le monopole des entreprises de la Big Tech pour les appels d’offres”, déclare-t-il en réclamant les décrets d’application de la loi sur la sécurisation des espaces numériques.
La remarque du député de l’opposition s’adressait au ministre de l’économie, “qui est également le ministre de la souveraineté numérique.” Ce n’est cependant pas Eric Lombard qui a pris la parole pour répondre, mais sa ministre déléguée à l’IA et au numérique, Claire Chappaz.
Cette dernière enchaîne les déclarations en faveur de la souveraineté numérique et d’un meilleur usage des dépenses publiques (et privées) pour qu’elles bénéficient aux acteurs technologiques européens.
Un cloud souverain pour héberger les données du SDNS
En préambule de sa réponse au député, la ministre a voulu afficher l’attachement du gouvernement à la sécurisation des données. “Il n’y a pas en France de données sensibles hébergées sur des serveurs non sécurisés. C’est un choix très ambitieux”, assure-t-elle.
Clara Chappaz n’adresse cependant ici que la dimension technique de la sécurité et non sa dimension juridique. Concernant enfin le Health Data Hub, la représentante du gouvernement reconnaît un besoin de vigilance.
“Aujourd’hui, il n’y a pas de données du système national de données de santé, le SDNS, dans le Health Data Hub. Et c’est un problème” pour développer des applications d’IA et la recherche. Si ces données n’y figurent pas, c’est faute d’hébergement approprié ou “ultra-sécurisé” comme le qualifie Clara Chappaz.
Un appel d’offres conjoint avec le ministère de la santé
“Nous allons, avec le ministre de la santé, enclencher un appel d’offres pour pouvoir faire migrer le Health Data Hub sur un hébergeur sécurisé (…) mais surtout (…) nous allons continuer à porter notre politique d’innovation.”
La ministre insiste sur les enjeux de souveraineté technologique et d’autonomie stratégique attachés aux projets d’innovation. A ces défis, Clara Chappaz assure que la solution ne peut être que l’innovation et “nos offres françaises.”
Le Health Data Hub doit donc migrer. Le constat remonte à l’origine même du projet. Il se fait cependant attendre depuis des années. La migration pourrait encore prendre du temps. La ministre ne fait mention d’aucun calendrier.
Pas de date de migration au HDH
Peut-être Clara Chappaz a-t-elle été inspirée par les déclarations d’un ancien ministre de la santé. En 2020, Olivier Véran plaidait pour une solution technique dans un délai compris entre 12 et 18 mois. En 2022, Cédric O, secrétaire d’État au numérique, renvoyait un tel projet à après la présidentielle.
Résultat : le dénouement se fait toujours attendre. De son côté, le Health Data Hub annonçait en mars 2025 étudier un transfert vers un cloud souverain et intensifier “ses échanges avec les différents acteurs du cloud français.”
Mais là aussi le calendrier est incertain. Le HDH fait savoir qu’il poursuit sa veille “sur les avancées du cloud souverain” et mène des travaux préparatoires à une migration sur une nouvelle infrastructure cloud.
Cette préparation doit amener le HDH à opérer une étape transitoire de sa migration au travers de la “mise en œuvre de la solution intercalaire.” La plateforme de données de santé promet “une information régulière lors du franchissement des grands jalons.”
En attendant, les fournisseurs cloud hexagonaux rongent leur frein. Régulièrement interrogés depuis deux ans, ils assurent être en capacité d’héberger le Health Data Hub, à performances et coûts égaux par rapport à Azure.