Le PDG de TotalEnergies, Patrick Pouyanné, prenait la parole à l’occasion du Forum InCyber de Lille, le FIC. Contexte géopolitique oblige, le dirigeant de la multinationale a été interrogé sur les enjeux de souveraineté numérique.
L’entreprise contribue-t-elle au développement de la souveraineté européenne dans ce secteur par la commande ? Il est permis d’en douter.
Mais plusieurs facteurs justifient les choix technologiques faits par le géant des énergies.
Un choix réduit à Microsoft et Amazon
“Mon vrai problème aujourd’hui dans le domaine du numérique et de l’intelligence artificielle, c’est qu’on n’a pas de champion européen”, argue-t-il notamment. Le patron ne se réjouit pas non plus de devoir consommer les offres des Gafam.
“J’ai le choix entre Amazon et Microsoft et je ne suis pas très à l’aise de mettre mes données dans tout ça”, déclare-t-il selon des propres rapportés par Les Echos. Faute d’alternative, les hyperscalers conservent leur domination.
Patrick Pouyanné se veut lucide cependant sur les questions réglementaires et économiques. Pas question ainsi d’héberger sur les cloud étrangers toutes les données, en particulier les plus sensibles. TotalEnergies détient des informations particulièrement critiques.
Des données sensibles conservées hors du cloud US
Comme l’indique le CEO, chaque année, un milliard de dollars sont consacrés à l’acquisition de données sismiques et géophysiques. Stratégiques, ces informations sont conservées dans des infrastructures privées.
Pouyanné exclut tout hébergement sur des serveurs américains compte tenu des risques. « La guerre économique existe », rappelle-t-il. Un cloud européen pourrait en revanche constituer une option pour l’énergéticien.
“Il faut un cloud européen », plaide ainsi le patron du CAC40 – mais qui milite pour une cotation à Wall Street. L’Europe représente l’échelon cible sur la souveraineté numérique selon Patrick Pouyanné, pour qui elle ne peut être traitée état par état.
Une régulation harmonisée et un régulateur unique pour rivaliser ?
Outre des champions et des infrastructures européens, le continent (et ses entreprises) a également besoin d’un régulateur unique et d’une véritable harmonisation réglementaire. La fragmentation dans ce secteur contribuerait au déficit de compétitivité de notre industrie numérique.
Pour les acteurs européens, c’est avant tout de commandes, privées et publiques, dont ils ont besoin pour investir plus et accélérer leur expansion à l’international. Entre offreurs et acheteurs, la responsabilité de la souveraineté (ou son absence) paraît parfois être imputée à l’autre bord – alors qu’elle est collective.
Se déclarant favorable à plus d’Europe sur le numérique, Patrick Pouyanné n’entend pas cependant s’attirer les foudres de Donald Trump. Le PDG se défend de tout rejet de la technologie ou des capitaux américains. TotalEnergies peut déjà se réjouir de l’appui de l’administration Trump à son mégaprojet gazier au Mozambique.