En Inde, les arnaques se perfectionnent grâce à l’intelligence artificielle. La Bourse de Bombay (Bombay Stock Exchange) a annoncé, fin avril, qu’elle allait porter plainte, après la diffusion, sur les réseaux sociaux, d’une vidéo falsifiée de son patron, Sundararaman Ramamurthy, dont l’avatar, virtuel et truqué, donne des conseils en investissement.
La désinformation, déjà très utilisée en politique, est en plein essor dans la finance, alors que le nombre d’investisseurs dans le pays connaît une hausse spectaculaire. Elle se répand grâce à la technologie du deepfake, un hypertrucage qui prend la forme d’une vidéo et s’achète en Inde pour seulement 8 roupies (9 centimes d’euro) l’unité.
Les deepfakes jouent le rôle de rabatteurs, par la confiance qu’ils suscitent, vers des influenceurs qui monnaient leurs conseils aux boursicoteurs débutants sur les réseaux sociaux. Or, les célèbres patrons indiens font d’excellents rabatteurs.
L’avatar de Ratan Tata, l’ancien patron de Tata, figure, par exemple, sur une vidéo où il recommande aux internautes de suivre la « formidable Laila Rao », une experte en finance pas comme les autres. De fait, ladite Mme Rao prodigue ses conseils en robe de chambre, avec le mot « finance » qui clignote en bas de l’image, entouré d’icônes de cœurs battant la chamade.
Les experts comme elle sont surnommés les « finfluenceurs ». Pas toujours crédibles, ils mettent en scène, sur YouTube, leur fortune comme preuve de leur réussite et commentent des graphiques complexes comme gages de leur expertise. Régulièrement, le gendarme boursier indien ferme les comptes de ces arnaqueurs qui monnayent très cher leurs conseils bidon, et dont certains sont suivis par des centaines de milliers d’abonnés.
Une capitalisation qui a doublé en trois ans
Si les conseils sont tant recherchés en Inde, c’est que les investissements en Bourse y sont un phénomène nouveau. Celui-ci a commencé pendant le confinement, en pleine pandémie liée au Covid-19, et bénéficie de la bonne santé de l’économie locale, ainsi que de la numérisation, qui facilite les opérations d’achat et de vente.
Fin 2023, la Bourse de Bombay est passée devant celle de Hongkong au septième rang mondial, avec une capitalisation de 4 000 milliards de dollars (3 712 milliards d’euros), qui a doublé en trois ans. L’indice de référence, le Sensex, a progressé de 20 % en un an. Il n’y a pas que l’intelligence artificielle qui fait monter les cours. En 2023, les introductions de Mankind Pharma, qui fabrique des tests de grossesse et des préservatifs, ou de Cello World, qui produit des ustensiles de cuisine, ont permis de lever des centaines de millions de dollars.
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