La Chine annonce stopper l’exportation des technologies nécessaires à l’extraction, le traitement et la fusion des terres rares. Une décision qui sonne comme une réponse à la volonté américaine de couper la Chine des semi-conducteurs.
À trop taquiner la Chine, elle finit par réagir. Le ministère du Commerce chinois a annoncé ce jeudi 21 décembre 2023 stopper l’exportation de diverses technologies servant à l’extraction, le traitement et la fusion des terres rares.
Concrètement, cela pourrait avoir un sérieux impact sur le commerce mondial, puisque comme le dispose La Tribune, qui déniché l’information, la Chine contrôlerait aujourd’hui environ les trois quarts de la production des terres rares. Ces dernières sont composées de 17 éléments indispensables à la production d’objets électroniques, allant des smartphones, en passant par les éoliennes, certaines technologies d’écran, les batteries, les puces et jusqu’à des technologies militaires.
Or les besoins en la matière devraient fortement augmenter : l’AEIA (Agence internationale de l’énergie) estime que le développement des technologies bas-carbone devrait multiplier la demande mondiale par sept d’ici à 2040. La Chine veut sans doute se poser ainsi en acteur incontournable de ce secteur et tuer dans l’œuf les marges de manœuvre de ses concurrents. On note d’ailleurs que cette nouvelle législation n’interdit pas l’exportation de produits à base de terres rares. Au long terme, cela pourrait obliger plusieurs acteurs à se fournir en Chine pour certains éléments clés.
Une contre-mesure face aux actions des États-Unis
Depuis l’éclatement de la guerre en Ukraine, la question de l’indépendance technologique est largement remontée dans l’agenda des puissances occidentales. D’autant que les États-Unis imposent eux aussi des mesures restrictives de plus en plus sévères à l’encontre de la Chine. On peut remonter jusqu’à l’embargo contre Huawei en 2019. Mais plus récemment, la goutte d’eau qui a fait tout basculer est sans aucun doute l’ajout de semi-conducteurs à la liste du BIS (Bureau de la sécurtié des États-Unis), permettant de facto un blocus quasi total sur ces technologies.
Les deux géants se mènent donc une guerre économique qui aura certainement des répercussions sur l’intégralité du secteur. La Chine avait d’ailleurs déjà conditionné l’exportation de germanium et de gallium l’été dernier, deux métaux rares utilisés dans la production de micropuces dans les secteurs de l’imagerie médicale, des panneaux solaires photovoltaïques et dans les fibres optiques, avançait La Croix.
Vers l’autosuffisance chinoise
Le plan de la Chine semble assez clair sur le papier et se déroule en deux temps : couper le robinet des matières premières nécessaires à la production des semi-conducteurs et devenir un nouveau champion de la production de ces fameux semi-conducteurs.
Pour l’heure, Taïwan est clairement le champion mondial pour ce qui est des puces à la finesse de gravure la plus fine, avec notamment le fondeur TSMC, acteur incontournable de l’industrie. Mais la Chine s’active pour trouver une voie vers l’autosuffisance.
En août 2023, nous apprenions que la Chine s’apprêtait à lancer sa première machine de lithographie à 28 nm. Nous sommes certes très loin des 3 nm dont est capable TSMC pour le moment. Mais cela reste une véritable percée, qui permet à la Chine de gagne en indépendance sur le sujet et de gagner une bataille dans son long combat pour la production de A à Z de puces.
Autre méthode plus risquée, et qui ne fonctionnera pas à long terme, la Chine n’hésiterait pas à recourir à des pirouettes juridiques pour contourner les restrictions américaines. Un cas très concret a été dévoilé en mars 2023, avec des entreprises interdites d’acheter des puces Nvidia A100 qui décidaient donc de les louer.
Réaction des USA et de l’UE
Les premières ripostes de l’UE et des USA sont déjà tombées. L’UE souhaiterait mener « des actions dans le cadre de l’OMC ».
Les USA pour leur part ont fait savoir dans la foulée qu’ils lançaient une enquête sur la « chaîne d’approvisionnement des semi-conducteurs ». L’objectif est clair : « réduire les risques pour la sécurité nationale posés par la Chine », écrit le département du commerce américain. Gina Raimondo, secrétaire au Commerce, appelle dans un communiqué à la « réinitialisation » des relations économiques entre la Chine et les États-Unis. Ces derniers mois, les mesures coercitives prises d’un côté ou de l’autre nous éloignent de plus en plus d’une coexistence pacifique, pour se diriger vers un équilibre de la terreur.
Source :
La Tribune