« La façon dont l’IA définit l’image d’une femme belle peut créer des ravages »

« La façon dont l’IA définit l’image d’une femme belle peut créer des ravages »


A quoi ressemble une femme belle ? On peut imaginer les mines affligées devant une question aussi stupide. Le problème est que beaucoup se la posent depuis que l’intelligence artificielle (IA) occupe les esprits, et les algorithmes nos ordinateurs. Car les réponses font tourner l’économie, les médias, les chercheurs, les artistes et les têtes. Elles n’ont jamais été aussi problématiques.

Le Washington Post a demandé à trois acteurs majeurs de l’image générée par IA (Midjourney, Stable Diffusion et DALL-E, du groupe OpenAI) de lui fournir des centaines d’images à partir de questions sur le visage et la morphologie du corps féminin, avant de les analyser dans son édition du 31 mai.

L’IA a une réponse bien précise quand on lui donne pour instruction de cerner la « beauté » d’une femme : visage jeune, peau claire et lisse, nez retroussé, pommettes saillantes, maquillage appuyé, cheveux longs et légèrement bouclés, poitrine ronde, hanches fines, robe fastueuse au décolleté sexy. Ce profil de Barbie est accentué par le concours de « Miss IA », organisé le 10 mai par le site Fanvue, avec dans le jury deux mannequins virtuelles – il en existe de plus en plus –, dont l’espagnole Aitana Lopez, qui gagne (ou plutôt dont le créateur gagne) 10 000 euros par mois. C’est carrément sexué : jambes interminables, taille fine, fesses généreuses, gros seins.

Il est surprenant que ces résultats puissent surprendre. Il n’a pas fallu attendre l’IA, et même pas l’Internet, pour que la mode, les concours de Miss, l’imagerie publicitaire, le cinéma, la photographie, les magazines, l’industrie cosmétique, la chirurgie esthétique, et on en oublie, définissent un modèle de beauté ébauché par des sculpteurs sous l’Antiquité.

Ce qui est nouveau, c’est l’intensité et la radicalité. Avec l’IA, les stéréotypes visuels, sur la beauté et d’autres sujets, s’imposent de façon exponentielle dans l’industrie du divertissement, les réseaux sociaux et le marketing. Avant l’Internet, toutes sortes de créatifs, des hommes, mais aussi des femmes, étaient chargés de faire tourner le marché de la séduction féminine, parfois avec talent. Aujourd’hui, derrière le parfait bouc émissaire que constitue l’IA, se cachent des banques conservant des milliards d’« images sources », impersonnelles, tirées de l’Internet, dont une partie non négligeable du champ pornographique, que des programmateurs, essentiellement des hommes, vont mixer et associer à des mots afin de répondre à toute demande.

Plus aucune part de réalité

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