Pendant longtemps, le jeu en valait la chandelle : des consommateurs rusés contournaient la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) en achetant chez des marchands peu scrupuleux, situés hors de l’Union européenne (UE), des produits facturés jusqu’à 20 % sous leur prix habituel. Mais depuis juillet 2021, l’entrée en vigueur d’une réforme de la directive européenne sur la TVA a corsé les règles.
Premier constat : il est devenu beaucoup plus difficile de trouver des marchands malhonnêtes sur les grandes places de marché, comme Amazon ou Cdiscount. Car depuis la réforme, ce sont elles qui doivent s’acquitter de la TVA, et non plus les nombreux vendeurs qu’elles hébergent. Elles sont désormais redevables de la taxe pour chaque achat qu’elles facilitent. « Les grandes places de marché se sont très vite alignées », constate ainsi Odile Courjon, avocate en droit douanier. « Elles ont été obligées de faire le ménage parmi les milliers de vendeurs référencés » en chassant les petits marchands qui fraudaient la TVA.
Mais l’intégralité des ventes de l’e-commerce n’a pas lieu sur ces places de marché. Il subsiste des vendeurs indépendants, qui ont leur propre site de vente et dont certains sont installés hors de l’UE, dans des pays où les sanctions sont difficilement applicables. Ceux-là peuvent continuer de vendre des produits sans TVA aux consommateurs européens, sans être vraiment inquiétés.
Franchise annulée
Sauf, peut-être, au moment d’expédier leur paquet. Par le passé, beaucoup de ces marchands déclaraient en effet une valeur de colis inférieure à 22 euros, ce qui leur permettait d’échapper à la TVA. Cette exonération a été supprimée par la réforme et ils doivent désormais payer la TVA à partir du premier centime. Résultat : le nombre de paquets taxables a été multiplié par six. « Pour 2022, cela représente une augmentation de recettes de 1,4 milliard d’euros, estime Patrice Pillet, chef de la TVA à Taxud, la direction des douanes européenne. Environ 20 % de cette somme va à la France. »
Reste une astuce pour les vendeurs malhonnêtes : éviter les transporteurs internationaux privés, habitués à payer la TVA, en confiant leurs colis à La Poste, un canal d’importation où cette taxe était jusqu’à récemment rarement acquittée. « Historiquement, La Poste était hors jeu. Elle ne connaissait pas la valeur des colis qu’elle faisait transiter », résume Xavier Pascual, délégué adjoint à la stratégie de la direction générale des douanes. Mais, là encore, la réforme a compliqué la tâche des fraudeurs : La Poste a désormais l’obligation de scanner chaque colis entrant en France, ce qui déclenche automatiquement l’envoi à la douane d’une déclaration électronique mentionnant la valeur du produit.
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