La rentrée des classes avant l’heure des petits influenceurs

La rentrée des classes avant l’heure des petits influenceurs


Devant la ribambelle de stylos, Lili, 14 ans, deux couettes blondes tirées en arrière, hésite sur le modèle qu’elle choisira pour son passage en 3e. « On peut pas dire… Tu as le choix à Bureau Vallée ! », fait mine de s’étonner son grand frère, Gabin, 17 ans. Tels de vrais petits communicants, Gabin et Lili vantent les mérites de leur sponsor à toutes les sauces. « On a un maxi bon plan pour vous, les amis : si vous ramenez votre calculatrice… Bureau Vallée vous la reprend, vous donne 5 euros et vous en offre une neuve ! » En collaborant avec les deux jeunes influenceurs, l’enseigne de papeterie s’offre une belle visibilité, avec 489 000 vues en trois semaines.

Chaque année au mois de juillet, l’histoire se répète. Des ­centaines de vidéos « Back to school » (« retour à l’école ») ­envahissent YouTube. Le concept est simple : faire une « chasse aux fournitures scolaires », selon la formule consacrée, dans un magasin sponsor privatisé pour l’occasion. Munis de la fameuse liste de fournitures scolaires, Gabin et Lili déambulent ainsi dans les rayons de Bureau Vallée, à Saint-Priest-en-Jarez (Loire). Le duo rassemble une communauté de 926 000 abonnés. Parmi leurs concurrents, deux chaînes d’enfants influenceurs dominent le marché : celle de Studio Bubble Tea, avec 1,82 million ­d’abonnés, et Swan & Néo, avec pas moins de 6 millions.

Placement de produits

Bureau Vallée (qui n’a pas souhaité ­s’exprimer) et Cultura sont les enseignes les plus citées dans les vidéos « Back to school ». La marque Maped a également flairé le bon filon. Les enfants représentent près de 20 % de leurs partenariats avec les influenceurs. L’année dernière, la firme s’est offert les services de Studio Bubble Tea. Incarnées par les enfants influenceurs Kalys et Athéna, 14 ans et 10 ans, les deux vidéos en collaboration avec Maped ont cumulé en tout près de 915 000 vues. « On fonctionne essentiellement avec des échanges de marchandises », explique Guillaume Chauzu, responsable digital et communication de marque chez Maped.

En échange du placement de produits, les enfants reçoivent de la papeterie gratuite. Les vidéos d’enfants influenceurs, qui s’apparentaient hier à un loisir – un enfant racontant son quotidien face caméra –, sont devenues, avec le temps, un travail méritant salaire. Conscient que le secteur évolue, Guillaume Chauzu estime que l’élaboration de contrats de travail deviendra bientôt incontournable, ce que Maped ne pratique pas encore.

« A partir du moment où on dépose les noms de ses gamins comme marque on ne peut plus parler de loisir ! » Thomas Rohmer, président de l’Observatoire de la parentalité et de l’éducation numérique

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