Les députés européens ont approuvé, jeudi 20 avril, des règles pour les cryptomonnaies, une première étape à un moment où plusieurs régulateurs dans le monde tentent d’encadrer ce secteur.
Le règlement MICA (Markets in Crypto-Assets), qui vise à réguler cette industrie pour lutter contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme et protéger les consommateurs, a été voté à une large majorité.
Jusqu’à présent, les transferts d’actifs virtuels, tels que les bitcoins, échappaient à la législation européenne sur les services financiers.
« Avec le règlement MICA, l’industrie européenne des cryptoactifs dispose d’une clarté réglementaire que des pays comme les Etats-Unis n’ont pas », a salué le rapporteur Stefan Berger (Parti populaire européen), estimant que cela apporte « un avantage concurrentiel à l’UE [Union européenne] ».
« Fin du Far West »
MICA, ainsi que la réglementation sur les transferts de fonds (Transfer of Funds Regulation, TFR), également adoptée, « marquent la fin du Far West non réglementé de la crypto », a commenté Ernest Urtasun (Verts), corapporteur de la commission des affaires économiques et monétaires sur les transferts de cryptoactifs.
L’absence de réglementation a « entraîné des pertes massives pour de nombreux premiers investisseurs et a servi de refuge sûr aux hackers, aux fraudeurs et aux réseaux criminels internationaux pendant plus d’une décennie », a-t-il souligné.
Concrètement, en vertu de la nouvelle législation européenne, les fournisseurs de services de cryptoactifs (CASP) devront s’enregistrer et fournir des données précises sur leur identité s’ils souhaitent opérer dans l’UE.
La « Travel Rule », déjà existante dans la finance traditionnelle, s’appliquera à l’avenir aux transferts de cryptoactifs. Elle obligera les fournisseurs de services de cryptoactifs à transmettre certaines informations sur les clients et transactions à l’institution financière destinataire de ces transactions.
Afin de réduire l’empreinte carbone élevée des cryptomonnaies, les plus gros fournisseurs de services devront en outre divulguer leur consommation d’énergie.
Le Monde
Offre spéciale étudiants et enseignants
Accédez à tous nos contenus en illimité à partir de 8,99 euros par mois au lieu de 10,99 euros
S’abonner
Ces textes, qui devront être officiellement approuvés par le Conseil, visent à renforcer la protection des consommateurs et apporter des garanties contre la manipulation des marchés et la criminalité financière.
Aller plus loin
Mais des voix ont tempéré leur impact. « Les acteurs de la crypto vont pouvoir commencer à appliquer des règles de base de la finance traditionnelle », a déclaré lors des débats, mercredi, l’eurodéputée Aurore Lalucq (groupe Socialistes et démocrates, gauche). « C’est bien, c’est mieux que rien, est-ce que c’est suffisant ? Non ! » a-t-elle estimé.
L’eurodéputée a notamment regretté les délais d’application prévus, expliquant à guise d’exemple que la plus grande plate-forme d’échange de cryptomonnaies au monde, Binance, « pourra se mettre en conformité avec MICA seulement dans dix-huit mois, dix-huit mois pendant lesquels les épargnants n’auront donc aucune protection ».
Début avril, Elizabeth McCaul, membre du conseil de surveillance de la Banque centrale européenne, avait, elle aussi, appelé, dans un billet de blog, à pousser les efforts encore plus loin.
Les transactions illicites effectuées avec des cryptoactifs en 2022 ont plus que doublé sur un an à près de 21 milliards de dollars (19 milliards d’euros), malgré un marché qui s’est réduit, selon la plate-forme de données Chainalysis.
Les déboires survenus ces derniers mois, dont les faillites de banques et de plates-formes comme FTX, ont secoué le monde des cryptomonnaies et relancé le débat sur la régulation du secteur.
Les régulateurs américains ont lancé une offensive contre les pratiques des acteurs du secteur. Fin mars, Binance a ainsi été assignée en justice par le régulateur américain des produits financiers dérivés.