Il y a deux façons de voir les résultats annoncés par Nvidia, mercredi 28 août. D’un côté, le fabricant de microprocesseurs destinés à l’intelligence artificielle (IA) a battu les prévisions des analystes, avec un chiffre d’affaires trimestriel de 30 milliards de dollars (27 milliards d’euros), en hausse de 122 % sur un an, et un bénéfice net de 16,5 milliards, en hausse de 168 %, avec une marge brute impressionnante de 75 %. De l’autre, l’entreprise a tout de même vu son cours reculer de près de 7 %, après clôture de la Bourse, car les investisseurs étaient habitués à des chiffres dépassant encore plus les espérances et à des croissances encore plus stratosphériques pour un titre qui a crû de 160 % environ en 2024 et 239 % en 2023, avec une progression du chiffre d’affaires supérieure à 260 % aux deux trimestres précédents.
Ce paradoxe et cette volatilité illustrent la tension autour de Nvidia et la nervosité des investisseurs qui voient l’entreprise américaine comme un symbole et un indicateur de la croissance future du secteur de l’IA. « Ce sont les résultats trimestriels les plus attendus par la Bourse cette année », avait déclaré avec emphase Dan Ives, l’analyste de Wedbush Securities, voyant dans Nvidia « le fondement de la révolution IA » et dans son PDG, Jensen Huang, « le parrain de l’IA ». Signe de l’excitation, des investisseurs avaient organisé dans un bar de New York une « watch party », afin de regarder la conférence des résultats en groupe, s’amuse le Financial Times.
Les analystes prêtent même à la santé de Nvidia des conséquences macroéconomiques, car le titre est devenu la deuxième capitalisation boursière mondiale (à 3 089 milliards de dollars avant clôture, derrière Apple et devant Microsoft) et représente 6 % de l’indice boursier américain S&P 500, ainsi que 18 % de ses gains depuis le début de l’année. A l’ouverture, le recul de Nvidia a entraîné les marchés asiatiques à la baisse, souligne Bloomberg.
« Emballement »
Nvidia est associé à l’IA depuis que ses processeurs graphiques, au départ créés dans les années 1990 pour les jeux vidéo, se sont révélés sans pareils pour réaliser les lourds calculs nécessaires pour entraîner et faire fonctionner cette technologie, notamment pour générer du texte et des images.
Depuis le décollage du secteur, dans le sillage du succès fulgurant du robot conversationnel ChatGPT, fin 2022, les processeurs dernier cri de Nvidia, à plusieurs dizaines de milliers de dollars la pièce, ont alimenté sa croissance exponentielle mais aussi une inflation des investissements dans l’IA qui commence à inquiéter les marchés. Nvidia et d’autres titres de la tech sont « dans une bulle », a résumé dans une lettre citée par le Financial Times le fonds Elliott Management, estimant l’IA en proie à « un emballement, alors que de nombreuses applications ne sont pas encore assez matures ».
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