L’Europe au cœur de la bataille entre opérateurs télécoms et groupes du numérique

L’Europe au cœur de la bataille entre opérateurs télécoms et groupes du numérique


Quatre personnes sont assises dans un petit avion en plastique. L’appareil ne vole pas. Il est posé au milieu du stand de l’opérateur sud-coréen SK Telecom. Et pourtant, avec leurs lunettes de réalité virtuelle connectées en 5G, les quatre occupants sont comme dans les nuages. Cette année encore, au Mobile World Congress (MWC), le salon mondial du mobile, qui se tient jusqu’au 2 mars à Barcelone, opérateurs, équipementiers et groupes de numérique rivalisent de démonstrations pour faire toucher du doigt les télécoms du futur. Mais ces derniers existeront-ils un jour ?

A écouter les opérateurs, les temps sont graves. L’explosion du trafic de données générée par les groupes de services numériques, Google, Apple, Facebook, Amazon, Netflix et autres, ceux que l’on appelle les GAFA, les contraint à investir toujours plus dans leurs réseaux, alors que, dans le même temps, disent-ils, régulation et concurrence compriment leurs bénéfices. « Les vents contraires pour notre industrie en Europe n’ont peut-être jamais été aussi forts (…) parce que les investissements massifs dans les réseaux – près de 600 milliards d’euros en Europe au cours de la dernière décennie ! – se révèlent difficiles à monétiser », a lancé Christel Heydemann, la directrice générale d’Orange, en ouverture du salon de Barcelone. D’où la volonté des opérateurs de faire payer plus fortement les GAFA à l’utilisation de leurs réseaux, ce dont les groupes de services numériques ne veulent pas entendre parler.

Cette bataille ne date pas d’hier. Mais le débat a pris un tour nouveau ces dernières semaines sous l’impulsion de Thierry Breton, le commissaire européen chargé du marché intérieur et du numérique, inquiet, lui aussi, de l’état des télécoms en Europe. « Les réseaux d’aujourd’hui ne sont tout simplement pas à la hauteur de la transformation massive qui s’opère », a constaté le commissaire à Barcelone. C’est pourquoi ses services ont lancé, le 23 février, et jusqu’au 19 mai, une consultation publique qui doit permettre, en plus de clarifier le débat, d’ébaucher ce que doivent être les réseaux de demain. « Je ne sais pas ce que sera le résultat de cette consultation. La question est de savoir ce que nous voulons construire ensemble. Après cela, nous verrons ce qu’il faut investir, qui doit payer pour quoi et s’il faut changer la réglementation. Je n’ai pas de tabou », a expliqué M. Breton.

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Une première victoire

Les opérateurs, qui voient dans cette consultation une première victoire, se défendent de viser une nouvelle taxe GAFA. « Nous ne demandons pas un nouveau mécanisme fiscal », a expliqué Mme Heydemann, mais « une contribution équitable et directe aux coûts du réseau », comme un péage. « Cela pourrait être un mécanisme tarifaire incitatif : plus on économise la bande passante, moins on paie », décrypte le dirigeant d’un autre opérateur français qui y voit aussi un argument environnement : cela inciterait les GAFA à contenir leur trafic et donc réduirait la consommation énergétique. L’Arcep, le gendarme français des télécoms, a constaté que fin 2021, 51 % du trafic vers les clients des quatre principaux opérateurs français provenait de cinq fournisseurs : Netflix, Google, Akamai (qui porte le trafic de plusieurs clients, comme Disney), Facebook et Amazon. « Est-ce pertinent de surdimensionner nos réseaux pour quelques acteurs ? », interroge ce dirigeant.

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