L’Europe sur le point de taxer les voitures électriques chinoises ?

Byd Han


Alors que le président chinois Xi est attendu pour sa première visite officielle en Europe depuis cinq ans, l’Union européenne serait sur le point de relever les frais de douane des véhicules électriques chinois, ou de mettre en place des quotas, suite au lancement d’une enquête officielle en septembre dernier.

Le président chinois Xi Jinping atterrit ce dimanche à Paris pour son premier voyage officiel en Europe depuis 2019 : il rencontrera Emmanuel Macron et Ursula von der Leyen le lendemain, pour une réunion Chine-Union européenne (UE) au sommet. Une partie de leur discussion devrait tourner autour du soutien massif du gouvernement chinois à son industrie de l’automobile électrique, qui permet à ses géants locaux comme BYD de casser les prix, au détriment des fabricants européens. Les véhicules électriques provenant de Chine représentaient près de 8 % de parts de marché en Europe en 2023, un chiffre qui pourrait atteindre 15 % en 2025, selon la Commission européenne.

Depuis septembre dernier, cette dernière enquête officiellement à ce sujet. Concrètement, Bruxelles doit déterminer si la Chine subventionne ou non ses véhicules électriques. En cas positif, l’UE pourrait décider d’augmenter ses droits de douane – qui avoisinent aujourd’hui les 10 %. De quoi relever les prix des voitures électriques chinoises sur le Vieux continent, et mettre vent debout la Chine pour qui l’avantage compétitif de l’industrie chinoise ne serait pas dû aux subventions publiques.

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C’est notamment la ligne tenue par Michael Shu, le président européen de BYD – l’un des principaux constructeurs automobiles chinois – qui était interrogé par le Financial Times en février dernier. « Notre succès ne vient pas des subventions, mais de notre technologie unique... », martelait-il, mettant en avant l’investissement massif fait dans cette technologie, bien en amont de ses concurrents (européens).

Des mesures avant les vacances d’été ?

Ces subventions faussent pourtant le marché en Europe, avec des prix rendus artificiellement inférieurs (de 20 % selon certains) par rapport à ceux des fabricants européens : voilà le constat que faisait déjà la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, en septembre dernier. Dans son discours sur l’état de l’Union européenne à Strasbourg, cette dernière expliquait que « les marchés mondiaux sont aujourd’hui inondés de voitures électriques chinoises bon marché, dont le prix est maintenu artificiellement bas par des subventions publiques massives » de Pékin.

Et selon Politico qui interrogeait Valdis Dombrovskis, commissaire européen en charge du Commerce, jeudi 2 mai, les conclusions de cette enquête arriveront prochainement – officiellement, elles doivent tomber avant le 4 juillet. La Commission européenne pourrait prendre des mesures provisoires sous la forme de droits de douane ou quotas « avant les prochaines vacances d’été », a-t-il laissé entendre à nos confrères.

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Les enquêteurs européens ont en effet passé au crible le large éventail de subventions versées par la Chine, allant des prêts à des taux inférieurs au marché, à des prix réduits sur l’acier et les batteries pour les constructeurs automobiles, jusqu’à la fourniture de terrains à des prix défiant toute concurrence. L’analyse n’aurait pas été simple, car elle reposerait sur la collaboration des constructeurs chinois, dont certains auraient fait preuve d’une certaine mauvaise volonté, rapporte Politico, jeudi 2 mai. Selon des lettres consultées par nos confrères en date du 23 avril, les trois fabricants chinois BYD, SAIC et Geely n’auraient pas fourni les informations demandées par l’UE.

Dans la presse circulent différents chiffres. Selon le cabinet de conseil AlixPartners cité par Reuters, Pékin aurait massivement subventionné la production de véhicules électriques et hybrides à hauteur de 57 milliards de dollars entre 2016 et 2022 : ces aides publiques lui auraient permis de devenir le plus grand producteur mondial de véhicules électriques. Le chiffre monte à 173 milliards de dollars, cette fois entre 2009 et 2022, selon Scott Kennedy, chercheur sur les politiques économiques de la Chine au sein du think tank CSIS (Center for Strategic and International Studies), cité en avril dernier par le Wall Street Journal.

Attirer les investissements chinois, et faire respecter les règles de l’OMC : le casse-tête d’Emmanuel Macron

Si difficultés d’accès aux chiffres il y a eu, l’UE aurait bien effectué des constatations, et tiré des conclusions. Lesquelles ? Cela reste à voir. Mais en attendant le début de l’été, Emmanuel Macron sera contraint de marcher, ces deux prochains jours, sur des œufs : l’occasion de jouer sa partition du « en-même temps », à savoir, essayer d’attirer les investissements chinois en France, tout en faisant davantage respecter les règles de l’OMC, comme il l’explique à nos confrères de The Economist, le 2 mai dernier : « Aujourd’hui, nous devons avoir sur le plan commercial avec la Chine un comportement respectueux, mais de défense de nos intérêts, de réciprocité et de sécurité nationale ». 

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Dans le camp adverse, la position de Xi Jinping devrait être la même : contribuer à éloigner toute augmentation des droits de douane sur les voitures électriques chinoises en Europe, qui défavorisera l’industrie chinoise. Le pays mène d’ailleurs un combat similaire devant l’OMC, l’organisation mondiale du commerce, cette fois contre les subventions américaines de l’« Inflation Reduction Act ».

Le plan de Joe Biden pour le climat a mis en place des crédits d’impôts auxquels les Américains ne peuvent prétendre, si le véhicule électrique acheté comporte des composants de batterie fabriqués par des sociétés chinoises. De telles mesures seraient contraires aux règles de l’OMC, soutient la Chine. Qu’importe que ce « protectionnisme américain » fasse écho aux aides massives octroyées par Pékin à sa propre industrie.

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