pour que l’Europe ne décroche pas, « Super Mario » …

pour que l’Europe ne décroche pas, « Super Mario » ...



« Un défi existentiel ». Dans son rapport sur la compétitivité de l’UE, Mario Draghi ne prend pas de pincettes. Si l’Europe ne se redresse pas rapidement, elle est appelée à décrocher face aux Etats-Unis et à la Chine. Le Vieux Continent qui « a largement raté la révolution numérique menée par Internet et les gains de productivité qu’elle a apportés », est face à son destin pour l’ancien président de la Banque centrale européenne (BCE).

Alors que l’UE entre dans pour la première de son Histoire dans une période où la croissance ne sera pas soutenue par sa croissance démographique – près de deux millions de travailleurs perdus par an d’ici 2040 – elle doit actionner d’autres leviers.

« Super Mario » propose un remède de cheval : réaliser un minimum de 750 à 800 milliards d’euros d’investissements supplémentaires par an « pour numériser et décarboner l’économie et accroître notre capacité de défense ».

Un plan Marshall démultiplié

Un effort sans précédent. L’Europe devra y consacrer environ 5 % de son PIB. « A titre de comparaison, les investissements supplémentaires prévus par le plan Marshall entre 1948 et 1951 représentaient environ 1 à 2 % du PIB par an. » Pour l’ancien Premier ministre italien, l’Europe doit devenir plus productive si elle ne veut pas perdre sa raison d’être et continuer à garantir à ses citoyens ses valeurs fondamentales que sont « la prospérité, l’équité, la liberté, la paix et la démocratie dans un environnement durable. »

Le temps est propice à cette révolution copernicienne qu’il appelle de ses vœux. « Alors que le monde est désormais à l’aube d’une nouvelle révolution numérique, déclenchée par la diffusion de l’intelligence artificielle, une fenêtre s’est ouverte pour que l’Europe corrige ses lacunes en matière d’innovation et de productivité et restaure son potentiel manufacturier. »

Pour Mario Draghi, le numérique est, de fait, le principal facteur qui explique l’écart croissant de productivité entre l’UE et les États-Unis. Il rappelle qu’environ 70 % des modèles d’IA fondamentaux ont été développés outre-Atlantique depuis 2017 et que les trois « hyperscalers » américains représentent plus de 65 % du marché mondial et européen du cloud.

Le défi d’une IA souveraine

Après avoir posé ce diagnostic alarmant, le docteur Draghi livre ses remèdes. « Si certains secteurs numériques sont probablement déjà « perdus », l’Europe a encore la possibilité de tirer parti des futures vagues d’innovation ». L’UE ne doit pas renoncer à conserver une souveraineté technologique dans les domaines du cloud souverain, de la cybersécurité, de la cryptographie, des semi-conducteurs, du calcul à haute performance (HPC) ou de l’internet par satellite.

En ce qui concerne l’intelligence artificielle, le risque est grand pour l’Europe « de devenir totalement dépendante des modèles d’IA conçus et développés à l’étranger, à la fois pour l’IA à usage général et, progressivement, pour des utilisations verticales dédiées à des secteurs cruciaux de l’UE, notamment l’automobile, la banque, les télécommunications, la santé, la mobilité et le commerce de détail. »

L’IA étant très dépendante des investissements initiaux en R&D, le rapport préconise de revoir l’accès aux financements des entreprises numériques innovantes qui ne parviennent pas à se développer en Europe faute de capitaux. Il propose aussi un assouplissement du cadre réglementaire pour ne pas entraver l’innovation, le chevauchement des lois, avec le RGPD et demain l’AI Act, pouvant freiner le développement d’une IA européenne.

Parachever le marché unique des télécoms

Dans le secteur des télécommunications, Mario Draghi, comme son compatriote Enrico Letta, appelle à une consolidation du marché afin de faire émerger des opérateurs à l’échelle européenne. Il propose de parachever le marché unique des télécommunications, en harmonisant les règles entre États membres et en favorisant les fusions et opérations transfrontalières.

A l’instar cette fois de Thierry Breton, récent commissaire européen en charge du marché intérieur, Mario Draghi reprend à son compte le principe d’un « fair share ». Soit la contribution des « très grandes plateformes en ligne », fortement consommatrices en bande passante, au financement des réseaux télécoms.

Pour Jenny Lindqvist, dirigeante d’Ericsson Europe et Amérique latine, « le rapport Draghi arrive à point nommé, mettant en lumière les défis auxquels l’Europe fait face et le rôle crucial que la connectivité jouera pour combler son écart de compétitivité, en tant que catalyseur de l’innovation et des technologies révolutionnaires telles que l’IA. »

Selon elle, « le rapport souligne à juste titre la nécessité de faciliter la consolidation dans le secteur des télécoms et d’harmoniser les meilleures pratiques en matière de tarification du spectre à travers l’UE. Ces deux éléments sont essentiels pour concrétiser un véritable marché unique des télécommunications et inciter au déploiement d’infrastructures afin de combler le fossé de productivité. »



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