Sur YouTube, la vie mise en boîte

Sur YouTube, la vie mise en boîte


Que feriez-vous si vous aviez au moins un petit millier d’années devant vous ? Personnellement, j’aimerais regarder une forêt pousser à partir de rien. Chacun ses fantasmes. Le mien est d’assister aux lentes successions végétales qui construisent au fil du temps des forêts matures. Depuis la formation du tout premier biofilm bactérien à la surface des roches brutes jusqu’à la canopée d’une vieille forêt, mettons une hêtraie, par exemple, en passant par toutes les étapes, de la mise en place du sol aux multiples strates de végétation : le mouvement ample de la vie. Mais, hélas, nos existences humaines sont brèves, et rares sont les forêts qu’on laisse (encore) pousser en toute liberté. Et puis tout ça pourrait finir par m’ennuyer, sans parler des fourmis dans les jambes.

Heureusement, YouTube et ses millions de vidéastes amateurs nous offrent quelques consolations. Ainsi de la chaîne néerlandaise « Life in Jars ? », pilotée par un biologiste pince-sans-rire et dandy. Sa raison d’être : créer des écosystèmes autonomes à l’intérieur de bocaux. Suivi par 350 000 abonnés, le jeune youtubeur aux manettes de « Life in Jars ? » s’adonne à d’autres expériences, comme cette tentative de devenir ami avec les corvidés du voisinage au moyen de cacahouètes.

Cependant, c’est une autre de ses vidéos, à l’air libre, qui nous intéressera ici. Le dispositif en est relativement simple. Le 6 mars 2021, le Néerlandais désopilant a rempli un bac en plastique avec de l’eau du robinet du réseau amsterdamois, d’excellente qualité, selon ses dires. Et puis il a laissé faire le temps pour observer les successions biologiques. Non pas un millénaire, mais tout de même une année et demie.

Trois jours après le début de son expérience, il constate que de la matière organique a pénétré ce nouvel écosystème en devenir sous la forme d’une petite mouche (morte). Au fil des semaines, d’autres viendront la rejoindre, ainsi que des feuilles et des graines portées par le vent. Deux mois plus tard, l’eau prend soudain une teinte marron : le résultat d’une explosion de vie bactérienne, explique-t-il. Bientôt, elle virera au vert, conquise par des algues microscopiques. Avant que des filaments d’algues multicellulaires, gluants au toucher, ne commencent à se former à la surface…

L’existence comme un grand tout

Tout est question d’échelle pour profiter du spectacle de ce que, somme toute, il convient de qualifier d’eau croupissante. C’est bien pour cette raison qu’à partir de ce stade notre biologiste dégaine ses outils de visionnage du microcosme, faisant apparaître en majesté algues du genre Chlamydomonas, zygnémas, grains de pollen et autres vorticelles.

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