Faire la cuisine est un passe-temps délicieux dans The Legend of Zelda : Breath of the Wild (2017). A chaque fois qu’une marmite se présente au héros Link, il est possible d’y mélanger les ingrédients ramassés durant nos pérégrinations pour concocter des petits plats ou des potions. Depuis le lait chaud jusqu’aux pommes au miel, en passant par les risottos de saumon, le résultat améliore temporairement nos capacités. Alors pourquoi s’en priver ?
Mitonner ses propres recettes a introduit le « crafting » (artisanat) dans la série de Nintendo. « Le “crafting” est très divers, ce qui rend difficile de le définir », explique au Monde Noah Wardrip-Fruin, professeur en médias informatiques à l’université de Californie à Santa Cruz. « Mais, en bref, il s’agit de la proposition de fabriquer des choses dans un jeu vidéo. Cela s’applique autant bien à des systèmes de jeux optionnels que nécessaires à la progression », précise le coauteur de l’article universitaire « Crafting in Games » (« l’artisanat dans les jeux », 2017).
The Legend of Zelda : Tears of the Kingdom, sorti le 12 mai sur Switch, prouve l’intérêt grandissant des studios pour la simulation de tours d’écrou ou de coups de pioche dans les jeux vidéo. Link y est désormais doté de pouvoirs inédits, qui lui permettent d’assembler des objets pour se créer des véhicules, résoudre des casse-tête ou concevoir des armes en tout genre. Fusionner une flèche avec un œil de monstre donne, par exemple, des projectiles à tête chercheuse. Assembler une planche, une toile et un lance-flamme produit une montgolfière.
Nouvelle cuisine
En passant de Breath of the Wild à sa suite, Nintendo passe aussi d’un artisanat optionnel à un artisanat imposé, observe Noah Wardrip-Fruin. « Je n’aurais pas soupçonné qu’ils allaient placer le “crafting” au cœur du jeu, s’étonne le chercheur. Le précédent s’y mettait timidement mais il passait à côté de choses élémentaires, comme l’absence de livre de recettes ou de personnalisation du village que l’on construit. »
Cette réinvention de Link a été gardée secrète jusqu’en mars dernier. Mais le producteur Eiji Aonuma a rappelé, dans une interview publiée par Nintendo le 10 mai, que cela était mûri de longue date : « L’une des singularités du jeu, qui consiste à attacher des objets entre eux, a été proposée très tôt durant le processus de développement par M. Fujibayashi [le réalisateur]. Il disait : “Je veux que l’on puisse s’amuser à faire cela dans la suite” [de Breath of the Wild]. »
Dès 2017, Hidemaro Fujibayashi confiait ainsi au magazine britannique Edge que Minecraft et Terraria, deux jeux qui stimulent la créativité avec de l’artisanat, l’avaient beaucoup influencé. Une déclaration dont il n’a été possible de percevoir tout le sens que des années plus tard.
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