Préquel de la trilogie entamée avec le reboot de Doom en 2016, suivi de Doom Eternal en 2020, la reine mère des FPS (« First Person Shooter », jeu de tir à la première personne) poursuit sa cure de jouvence avec Doom : The Dark Ages.
Le jeu, dont la sortie est prévue sur PC, PS5 et Xbox Series vendredi 15 mai, reste fidèle à sa philosophie : on y dégaine les armes dès les premières secondes, en terrain conquis, avec la ferme intention de ne laisser aucun répit au joueur. Les massacres frénétiques de démons se déroulent dans des mondes plus ouverts qu’à l’accoutumée mais restent structurés en arènes, où déferlent des hordes de monstres qu’il faut encore et toujours joyeusement déchiqueter.
Bad tripes
Au fil des missions, Doom : The Dark Ages enrichit son gameplay et renforce la synergie de ses mécaniques, introduisant de nouvelles armes rutilantes (le bouclier-tronçonneuse, réjouissante nouveauté, est un véritable plaisir à manier), des améliorations et des capacités inédites. Le jeu mêle ainsi le sentiment de progresser de façon stratégique dans la maîtrise de son arsenal, et dans le même temps celui de vivre une expérience plus instinctive, sensorielle et viscérale de démembrement généralisé. Dans ces combats, têtes et tripes sont donc sollicitées à égale mesure.

Certes, ce nouveau Doom accorde parfois une pause, le temps d’une ou deux énigmes – jamais bien complexes – glissées ici ou là, sans doute pour laisser au joueur le loisir de reprendre son souffle. Mais il donne surtout constamment envie de retourner au combat, au plus vite. Un effet de ballet gore renforcé par le nombre considérable d’esquives que le jeu exige, à la manière d’un bullet hell, ce genre où l’on doit survivre à des vagues massives de projectiles ennemis en slalomant avec précision.
Le titre peine toutefois à convaincre dès qu’il sort de ce cadre et tente d’innover. Avec leur mécanique de jeu rigide, les séquences à bord de méchas géants donnent l’impression d’un douloureux retour vingt ans en arrière. Quant aux passages à dos de dragon, qui évoquent Panzer Dragoon, ils peinent à captiver, tant leur nonchalance tranche avec les tueries grisantes du reste du jeu. C’est donc plutôt quand il reste au sol, bien campé dans ses bottes cloutées, que The Dark Ages demeure une expérience de shoot jubilatoire.
Médiéval et metal

Ce gameplay plutôt ciselé, cœur battant du jeu, s’inscrit dans un scénario qui, lui, frôle allègrement le nanar. Peu avare en cinématique, le titre met en scène des personnages caricaturaux, entités démoniaques calées dans leurs cavernes saturées de braises, tirant les ficelles à renfort de répliques sentencieuses. Doom n’est en réalité jamais aussi plaisant que lorsqu’il se tait totalement, laissant s’épanouir la symphonie grinçante de cris gutturaux et de metal syncopé. Le jeu est d’ailleurs d’une grande musicalité, où chaque exécution résonne comme un claquement de basse.
L’ensemble se déploie dans un univers lorgnant cette fois vers le médiéval-fantastique, curieux mélange de cybernétique et d’heroic fantasy, avec de superbes panoramas traversés par des batailles en arrière-plan où titans et vaisseaux se rentrent dans le lard, tandis que le joueur, lui, se démène ici-bas contre les diables. Doom : The Dark Ages impressionne ainsi par ce qu’il parvient à accomplir au sein de sa propre mythologie : se moderniser sans jamais trahir sa philosophie. Il épouse pleinement son époque, avec une fluidité technique irréprochable, tout en conservant une saveur résolument old school de FPS dégénéré et inconséquent.

Hélas, ce nouvel opus n’échappe pas à une certaine redondance, peinant à tenir la cadence d’une intensité qu’il place très haut d’emblée. Alors cette débauche d’énergie, cette peur de la répétition deviennent, paradoxalement, ses plus grands ennemis.
En bref
On a aimé :
- l’ajout d’un bouclier-tronçonneuse jouissif ;
- le ressenti brutal de certaines armes ;
- l’univers médiéval-cyberpunk : improbable et stylé ;
- devenir une machine à tuer… et aimer ça.
On n’a pas aimé :
- les séquences à dos de dragons et en méchas, plutôt pauvres ;
- les cinématiques : on aurait préféré des munitions.
C’est plutôt pour vous si :
- vous aimez les bains de sang à 200 BPM ;
- vous trouvez qu’un dragon, c’est bien, mais un dragon avec un fusil dans la bouche, c’est mieux.
Ce n’est plutôt pas pour vous si :
- vous aimez les récits profonds et subtils ;
- vous pensez que la violence, c’est mal (vous êtes foutu) ;
- vous supposez que l’univers médiéval-fantastique se limite à des petits elfes mignons.
La note de Pixels
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