« The Roottrees are Dead », un jeu d’enquête et une tentaculaire affaire de famille

« The Roottrees are Dead », un jeu d’enquête et une tentaculaire affaire de famille


Décidément, Return of the Obra Dinn (2018) n’en finit pas de faire des petits. Baptisé The Roottrees are Dead, cet héritier-ci est disponible depuis le mercredi 15 janvier sur PC, Mac et Linux. Le principe ? Après le crash d’un avion à bord duquel se trouvaient quatre membres de la richissime famille Roottree, magnats américains de la confiserie, une mystérieuse commanditaire vous demande d’enquêter sur leur dynastie en vous promettant une juteuse récompense si vous parvenez à percer un secret dont vous ignorez encore la nature. Ça tombe bien, il paraît que vous êtes le meilleur quand il s’agit de recherches familliales.

Concrètement, cette étrange mission consiste à remplir un immense arbre généalogique vide. Pour chaque descendant direct, il convient ainsi de déterminer le nom complet, la profession et d’adjoindre une photo. Le tout sans quitter le confort de votre chambre. Heureusement, nous sommes en 1998 et votre ordinateur est connecté à une incroyable et toute nouvelle corne d’abondance informationnelle : Internet.

Regroupement familial

Cette mouture de 2025 est en réalité la refonte d’un prototype gratuit, créé il y a deux ans par Jeremy Johnston. A l’époque, il fait appel à des images fabriquées à l’aide d’une intelligence artificielle générative, ce qui lui a valu quelques remontrances de la part de certains joueurs, mais n’a pas empêché ce premier jet de rencontrer un réel succès. Alors, afin d’offrir à son projet une commercialisation en bonne et due forme, il décide ensuite de confier à une équipe la tâche d’un ravalement de façade, avec des doubleurs et des illustrateurs. Bien humains, cette fois-ci.

Si l’interface a été revue et simplifiée, les fondamentaux du titre restent les mêmes. On doit entrer dans un moteur de recherche certains mots-clés qu’on aura repérés, ici dans une coupure de presse, là dans un prospectus publicitaire, ou tout bêtement sur une autre page en ligne. De nombreuses requêtes ne donneront rien, mais d’autres permettront d’y voir plus clair sur cette famille, dont les racines remontent au début du XXe siècle. Et quel plaisir que d’entendre le bruit de l’imprimante qui s’allume, signal pavlovien signifiant qu’un document d’intérêt supplémentaire vient d’être récolté, synonyme de détails inédits et de nouveaux visages à ajouter au dossier !

C’est dans le processus de validation des hypothèses que la parenté avec Obra Dinn est particulièrement évidente. Si, dans le titre de Lucas Pope, on ne nous confirmait l’exactitude des réponses qu’une fois quatre membres d’équipage correctement inscrits dans notre registre, ici, trois membres de la famille suffisent. Un système de vérification toujours aussi équilibré, qui ménage la réflexion tout en autorisant un tout petit peu de force brute (en essayant toutes les options jusqu’à ce que ça passe), mais uniquement quand on est certain des deux autres propositions.

Le moteur de recherche rudimentaire ne vous affichera pas les pages Web, mais un résumé des informations qui s’y trouvent.

Une question d’héritage

Jeremy Johnston évoque une autre inspiration : Her Story (2015), qui demandait de retrouver des vidéos dans une base de données policière mal fichue. On comprend pourquoi. The Roottrees are Dead propose la même approche très sensorielle des technologies de la fin des années 1990, avec les bruits du clavier, le bourdonnement de l’écran cathodique et le cliquetis du disque dur mécanique. Une philosophie restrictive, également : les pages Internet que l’on visite sont systématiquement des résumés, les options de recherche sont limitées et certaines bases de données (comme celle des magazines périodiques) sont, de prime abord, incomplètes. La somme de toutes ces limitations rend presque impossible la moindre découverte accidentelle. Pour trouver quelque chose, il faut spécifiquement le chercher, et donc avoir d’abord un peu réfléchi.

Les photographies seront primordiales : il s’agit du seul moyen de mettre des visages sur des noms.

On peut déplorer ces barrières, alors que l’excellent Hypnospace Outlaw (2019) a déjà démontré qu’il était possible de laisser les joueurs baguenauder sur un véritable Web fictif, tout en ménageant les contours d’un mystère à élucider. Mais ces très légers regrets ne résistent pas bien longtemps devant la maîtrise narrative et ludique de The Roottrees are Dead, dont la trame finit par nous faire gamberger la nuit en regardant le plafond : « Elle parle de son cousin, mais lequel ?  », « Qui diable se cache derrière ces initiales ?  » ou encore « Quelle est la couleur des yeux de cette personne sur cette photo en noir et blanc ? » Des insomnies qui, généralement, sont la marque des grands jeux d’enquêtes.

L’avis de Pixels

On a aimé :

  • l’affaire en elle-même, bien construite, pleine de petites histoires imbriquées ;
  • les épiphanies, puissantes, quand on comprend enfin qui est cette personne sur cette photo.

On a moins aimé :

  • le manque d’accès à un vrai petit Internet, comme dans Hynospace Outlaw ;
  • pas de traduction en français, en tout cas pour le moment. Mais le développeur nous a assuré qu’une telle hypothèse était envisagée ;

C’est plutôt pour vous si :

  • vous aimez les jeux d’enquêtes exigeants qui vous laissent vous perdre dans des quantités invraisemblables de documents.

Ce n’est plutôt pas pour vous si :

  • vous n’aimez pas les résultats de recherches vides et les erreurs 404.

La note de Pixels :
Cousin au quinzième degré (sur 20).



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