Une procédure pénale a été engagée contre Twitter par la justice allemande, a annoncé l’Office fédéral de la justice (BFJ) dans un communiqué de presse publié mardi 4 avril. Le réseau social américain se voit reprocher « des défaillances dans la gestion des plaintes » des utilisateurs.
« De nombreux contenus publiés sur Twitter que l’autorité considère comme illégaux, malgré les plaintes des utilisateurs, n’ont pas été supprimés ou bloqués par le fournisseur dans les délais légaux », énonce le communiqué. Cette « mauvaise gestion des plaintes » contrevient à la loi « NetzDG », la loi allemande chargée de sanctionner les contenus haineux sur les réseaux sociaux, entrée en vigueur en 2018. Cette dernière prévoit l’obligation pour les entreprises du Web de supprimer sous vingt-quatre heures les messages signalés lorsqu’ils sont, de façon évidente, diffamants, haineux ou colportant de fausses informations.
Si l’entreprise est condamnée, le BFJ pourrait lui infliger une amende s’élevant jusqu’à 50 millions d’euros. Dans le cadre de la loi NetzDG, Meta, l’entreprise propriétaire de Facebook et d’Instagram, avait ainsi été contrainte en 2019 de verser 2 millions d’euros.
« Défaillance systémique »
Avec cette nouvelle procédure, ce sont essentiellement des contenus jugés diffamatoires, dirigés contre la même personne, qui ont été signalés sur une période de quatre mois par les utilisateurs. L’incapacité de Twitter, durant cette période, à les retirer dans les délais légaux pourrait indiquer « une défaillance systémique » de la gestion des plaintes, relève le BFJ. Les équipes du réseau social ont désormais la possibilité de répondre à la justice allemande. Si les arguments avancés ne répondent pas aux exigences du BFJ, celui-ci saisira le tribunal du district de Bonn.
Cette procédure outre-Rhin met le propriétaire de Twitter, Elon Musk, au défi de la modération du réseau social. Ce libertarien revendiqué, qui s’érige comme un « absolutiste de la liberté d’expression », a toujours garanti que Twitter supprimerait les messages qui seraient contraires à la loi.
Toutefois, les moyens alloués à la modération ont été drastiquement réduits depuis que M. Musk a racheté l’entreprise, en octobre 2022. En décembre, 15 % de l’équipe « confiance et sécurité » a ainsi été licenciée et entre 4 400 et 5 500 prestataires externes ont été remerciés, selon la presse américaine. En janvier, la réduction des postes s’est poursuivie avec le départ d’une douzaine d’employés chargés de la modération dans les bureaux de Dublin et Singapour de Twitter, selon l’agence de presse Bloomberg.
Depuis le 25 janvier, Twitter fait également l’objet d’une autre procédure judiciaire en Allemagne, déposée par HateAid, une organisation de défense des droits numériques et l’Union européenne des étudiants juifs (EUJS). Cette plainte se fonde sur des contenus signalés à Twitter en raison de leur caractère antisémite, avec dans certains cas une négation de la Shoah, que l’entreprise a refusé de retirer.