Le 31 août, l’astronaute Thomas Pesquet a dû longuement expliquer sur Twitter que « bien sûr que oui, l’humain est allé sur la Lune pendant les missions Apollo », après que ses propos ont été déformés par des négateurs de la conquête par l’homme de notre satellite.
Enième illustration du fait que la désinformation en ligne continue d’être un problème sociétal majeur. Et ce, malgré la multiplication dans les médias de services de debunkers [de l’anglais debunk, « discréditer »], des journalistes qui, à l’image des Décodeurs du Monde, cherchent à vérifier des affirmations suspectées d’être fallacieuses. Comment trouver d’autres parades à ces « fake news » qui massivement se répandent sur les réseaux sociaux et, par ricochet, dans la société et les foyers ?
Une équipe internationale de chercheurs en psychologie des universités de Cambridge, Bristol (Royaume-Uni) et Perth (Australie) a réalisé une expérience inédite par son ampleur, à l’aide d’un partenariat avec le laboratoire Jigsaw (Google, Etats-Unis). Par vidéos interposées, ils ont « psychologiquement inoculé », expliquent-ils, de fausses nouvelles à faible dose à des internautes afin de stimuler, un peu à l’image d’un vaccin, l’immunité de ceux-ci envers la désinformation, et de leur apprendre à faire le tri entre le bon grain et l’ivraie. Les résultats obtenus, plutôt encourageants, ont été publiés dans Sciences Advances le 24 août.
« Nous avons eu l’idée par “inoculation” d’immuniser les gens contre les techniques de manipulation courantes en créant, en février 2018, le jeu des mauvaises nouvelles », explique l’auteur principal de la publication, Jon Roozenbeek, de l’université de Cambridge. L’idée de ces vidéos s’inscrit dans le prolongement de ce premier travail. »
Etude en labo et en « vie réelle »
Pour lancer cette nouvelle étude, les chercheurs ont imaginé cinq courts films de quatre-vingt-dix secondes qui présentent des techniques de manipulations fréquemment utilisées dans des pratiques de désinformation : le langage émotionnellement manipulateur, l’incohérence, les faux dilemmes, la technique du bouc émissaire et les attaques ad hominem.
Chacune des vidéos s’articule de la même façon : un premier message trompeur – par exemple dans le cas du langage manipulateur, une petite fille triste avec une voix off appelant à regarder la suite même si cela va faire pleurer –, puis vient un film d’animation pour décrypter la manipulation. « Quand le message est annoncé comme générant des émotions négatives telles que la peur, la colère ou le mépris, cela donne envie de regarder le reste de la vidéo », apprend-on. Enfin, un court exercice pratique conclut le film afin de vérifier que la technique de manipulation a été bien assimilée.
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