Plus former, davantage investir, revaloriser le salaire des chercheurs en IA et faciliter l’accès aux données : voilà la recette du comité de l’IA, rendue au président de la République ce mercredi 13 mars, pour que le pays devienne un champion du secteur.
C’est un rapport attendu qui est rendu ce mercredi 13 mars au président de la République : celui sur lequel planche le comité interministériel sur l’intelligence artificielle générative depuis cinq mois. Ce groupe de travail, créé par l’exécutif en septembre dernier pour « veiller à notre souveraineté et protéger nos concitoyens », rassemblent des experts, des hauts cadres français de Meta et de Google, des professeurs et des ministres.
Leur mission était de définir les lignes directrices de la France en matière d’intelligence artificielle, dont les « leviers qui nous permettront de devenir des leaders dans le domaine », expliquait Bruno Le Maire, le ministre de l’Économie, en septembre dernier.
Comment éviter « le déclassement économique » ?
Intitulé « IA : notre ambition pour la France », le rapport liste plusieurs mesures pour que l’Hexagone évite le « déclassement économique » en la matière. Il préconise d’abord de réorienter l’épargne vers l’innovation afin de pallier le problème de financement des start-ups françaises et européennes. « Les montants investis dans l’IA aux États-Unis sont vingt fois supérieurs à ceux investis en France », regrettent les auteurs du rapport, pas encore accessible à l’heure de la publication de cet article. Mais certains extraits du texte ont été cités par l’Élysée, lors d’une conférence de presse le mardi 12 mars.
Les investisseurs ont en effet tendance à se tourner vers les États-Unis, au détriment des entreprises françaises et européennes. Mistral, la pépite de l’IA de l’Hexagone, avait ainsi justifié l’investissement fait par le géant américain Microsoft par un manque de financement des fonds européens.
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« Les financements actuels de l’écosystème de l’IA sont insuffisants pour faire émerger des acteurs de rang mondial », constatent les auteurs du rapport, cités par nos confrères du Point. « Des actions volontaristes doivent être rapidement prises en ce sens, par exemple en matière de fiscalité de l’assurance-vie, afin de disposer d’ici à quelques années d’une capacité de financement significativement accrue », ajoutent-ils. Le pays compte investir dans le secteur près de 5 milliards d’euros par an, précise l’Agefi, mardi 12 mars.
Formation, puissances de calcul…
Deuxième recommandation du comité IA : la mise en place d’un plan de sensibilisation à l’IA – avec un pendant lié à la formation, qui permettrait aux personnes et aux entreprises de se familiariser avec cette technologie. À côté des « cafés IA », des lieux d’expérimentation et d’appropriation de cette technologie, il s’agirait de former entre 50 000 et 60 000 spécialistes par an, contre seulement 15 000 aujourd’hui. L’adoption d’outils d’IA en entreprises et dans le service public permettrait d’engranger une hausse de 250 à 400 milliards d’euros du PIB d’ici 2030 ou 2035, selon le rapport.
Troisième levier préconisé : disposer de davantage de capacité de calcul. L’Hexagone abrite déjà le supercalculateur Jean Zay, mais il en faudrait d’autres pour répondre aux nombreux besoins des entreprises du secteur. Cet approvisionnement pourrait se faire via la commande européenne.
Des salaires revalorisés pour les chercheurs en IA
Quatrième recommandation : mettre en place « une “exception IA” dans la recherche publique ». Concrètement, il s’agirait de revaloriser les salaires des chercheurs en IA en France. De nombreux chercheurs français sont contraints de quitter le territoire par manque de postes, et surtout pour le peu d’attractivité des salaires pratiqués au sein de la recherche publique. Il est aussi question de « faciliter les temps partiels avec des entreprises ou d’autres acteurs socio-économiques de l’IA », détaille Le Point.
Davantage d’accès aux données de santé
Une autre recommandation a trait aux données personnelles – indispensables à l’IA – qui doivent être davantage accessibles – y compris les data en santé. Il s’agirait de « supprimer certaines procédures d’autorisation préalable d’accès aux données de santé » et de « réduire les délais de réponse de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) » par laquelle les centres de recherche et les entreprises doivent passer avant d’accéder aux données.
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« Arrêtez les comités Théodule ! »
Enfin, les auteurs du rapport préconisent d’œuvrer à une gouvernance mondiale de l’IA. La France accueillera le prochain sommet sur la sécurité de l’IA prévu à la fin de l’année ou en début d’année prochaine.
Ces analyses seront-elles suivies d’effet ? Difficile à dire. Mais pour Asma Mhalla, la spécialiste des enjeux géopolitiques de la tech qui était interrogée chez nos confrères de Franceinfo ce mercredi 13 mars, il serait temps « d’arrêter les comités Théodule ». « Il faut, au contraire, quand on est un petit pays périphérique comme la France, décélérer (…). Des guidelines, des rapports, des notes, on en a maintenant des tonnes, littéralement. La question n’est pas de les cumuler et de faire de la communication politique, c’est de s’arrêter deux secondes et de se demander où va-t-on. Qu’est-ce qu’est la France dans 40-50 ans ? Si vous posez la question à des Russes, à des Chinois, à des Américains, à des Turcs, à des Israéliens, ils le savent. Si vous posez la question à un Français, on ne sait pas ».
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Source :
Le Point