Après des semaines de déclarations controversées, le fondateur de la plate-forme de cryptomonnaies FTX a été arrêté par la justice. Bientôt extradé aux États-Unis, l’ancien chevalier blanc de l’industrie cherche à éviter les sanctions en mettant en avant son incompétence.
Un mois après la banqueroute de FTX, Sam Bankman-Fried a finalement été arrêté aux Bahamas. Ce lundi 12 décembre 2022, les autorités des Bahamas ont en effet procédé à l’arrestation du trentenaire à la demande de la justice américaine. Le jeune homme a été interpellé à son domicile de Nassau dans le courant de la soirée.
USA Damian Williams: Earlier this evening, Bahamian authorities arrested Samuel Bankman-Fried at the request of the U.S. Government, based on a sealed indictment filed by the SDNY. We expect to move to unseal the indictment in the morning and will have more to say at that time.
— US Attorney SDNY (@SDNYnews) December 12, 2022
Cette arrestation fait suite à une plainte déposée par le procureur de New York contre Sam Bankman-Fried. Le fondateur de FTX est notamment accusé de blanchiment d’argent, de fraude électronique et en valeurs mobilières, et de conspiration en vue de commettre une fraude. À titre d’exemple, une peine allant jusqu’à vingt ans de prison fédérale est prévue pour les individus reconnus coupables de fraude électronique.
« Nous prévoyons de lever les scellés sur l’acte d’accusation dans la matinée et nous aurons plus à dire à ce moment-là », déclare Damian Williams, le procureur américain en charge de l’affaire.
Concrètement, SBF est accusé d’avoir sciemment détourné les fonds des clients de FTX. Avec l’argent des utilisateurs, l’homme aurait financé les opérations de trading de la société Alameda Research, acheté de luxueuses maisons de vacances, et investi des sommes colossales dans des start-up crypto. Aux dernières nouvelles, FTX doit de l’argent à plus d’un million de créanciers. Plus de 8 milliards de dollars auraient été engloutis par la plate-forme.
L’acte d’accusation, consulté par une source du New York Times, mentionne uniquement SBF. Caroline Ellison, l’ancienne PDG d’Alameda Research, et le cofondateur de FTX Gary Wang ne sont pas évoqués. La Securities and Exchange Commission (SEC), le gendarme financier des États-Unis, a félicité les forces de l’ordre pour l’arrestation de SBF. Le régulateur s’engage à déposer des accusations distinctes contre le fondateur de FTX dans les heures à venir.
Gurbir Grewal: We commend our law enforcement partners for securing the arrest of Sam Bankman-Fried on federal criminal charges. The SEC has authorized separate charges relating to his violations of securities laws, to be filed publicly tomorrow in SDNY. https://t.co/ON0LgY4mf4
— U.S. Securities and Exchange Commission (@SECGov) December 13, 2022
Extradition vers les États-Unis
Ce mardi 13 décembre, l’ancien milliardaire comparaîtra devant une cour des Bahamas. D’après le procureur général des Bahamas, Ryan Pinder, les États-Unis ont ensuite l’intention de demander l’extradition de SBF vers le sol américain. En parallèle, l’archipel bahamien a annoncé l’ouverture de sa propre enquête criminelle au sujet de la faillite de FTX.
« Au moment où une demande formelle d’extradition sera faite, les Bahamas ont l’intention de la traiter rapidement, conformément à la loi bahamienne et à ses obligations conventionnelles avec les États-Unis », explique Ryan Pinder.
Détenu par les forces de police des Bahamas, Sam Bankman-Fried ne pourra pas se rendre à Washington comme prévu. L’entrepreneur devait en effet témoigner devant une commission parlementaire de la Chambre des représentants au sujet de la débâcle de FTX. Par contre, l’avocat en charge de la faillite devrait effectivement témoigner devant la Chambre.
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La défense de Sam Bankman-Fried
Depuis la faillite de FTX, Sam Bankman-Fried a élaboré sa ligne de défense. Lors de plusieurs apparitions publiques, l’ex-milliardaire a démenti les accusations de fraude. Il prétend n’avoir jamais sciemment détourné les fonds de sa clientèle. Pour expliquer la débâcle de son empire, SBF pointe plutôt du doigt sa prétendue incompétence et admet une série d’erreurs. Grâce à cette stratégie, l’entrepreneur espère vraisemblablement éviter de lourdes sanctions.
« Je n’ai jamais essayé de frauder sur quoi que ce soit », assurait SBF à Andrew Ross Sorkin, journaliste au New York Times, début décembre.
Le prince déchu des cryptomonnaies a néanmoins admis que les fonds des clients FTX étaient directement versés sur les comptes bancaires d’Alameda Research à une époque. Quand un utilisateur FTX déposait des dollars sur son compte, il les envoyait en effet à la société de trading. Comme prévu, les deux sociétés étaient inextricablement liées. Ce mélange de fonds pourrait être considéré comme une fraude.
L’incompétence de SBF semble étayée par les découvertes de John Ray III, l’avocat chargé de la procédure de faillite de FTX. Après avoir étudié les comptes du groupe, l’expert a remarqué de graves négligences dans la gestion de l’entreprise :
« l’effondrement du groupe FTX paraît résulter de la concentration absolue du contrôle entre les mains d’un très petit groupe d’individus grossièrement inexpérimentés et peu doués, qui n’ont mis en œuvre aucun des systèmes ou des contrôles requis pour une société à laquelle sont confiés l’argent ou les actifs d’autres personnes ».
Pour se défendre face à la justice, Sam Bankman-Fried, dont la fortune se résumerait désormais à 100 000 dollars, a sollicité les services de Mark Cohen, un avocat pénaliste. C’est déjà la troisième fois que SBF change de représentant depuis le début de l’affaire.
Source :
New York Times