Le Bureau du droit d’auteur des États-Unis a publié de nouvelles directives qui tranchent la question de la protection, par le copyright, des images ou les textes produits par des systèmes d’IA.
L’intelligence artificielle (IA) peut-elle créer des œuvres artistiques, protégées par le droit d’auteur ? Oui sous certaines conditions, répond le Bureau du droit d’auteur des États-Unis, l’équivalent de l’Institut national de la propriété intellectuelle. Depuis plusieurs mois, ChatGPT, DALL-E et d’autres systèmes d’IA générative permettent de créer des textes, des images ou de la musique en réponse à des instructions d’utilisateurs, allant de la modification des tableaux connus à la création, ad hoc, d’illustrations ou de textes. S’ils ont ouvert un nouveau champ de créativité, ils ont aussi suscité de nombreuses questions juridiques, dont celle du droit d’auteur.
Les nouvelles directives du Bureau du droit d’auteur américain (l’US Copyright Office ou USCO), publiées mercredi 15 mars, sont donc tombées à point nommé. Car contrairement au droit français, où le droit d’auteur naît dès le moment où une œuvre de l’esprit est créée, sans nécessiter de passer par une procédure d’enregistrement, il faut, dans le système américain, déposer une demande pour bénéficier du « copyright ». Les demandeurs doivent remplir un formulaire et attendre la décision de l’USCO. L’avantage de cette procédure ? Cet institut, chargé de définir ce qui relève de la protection au titre du « copyright », de ce qui ne l’est pas, a été obligé de se pencher très tôt sur la question du droit d’auteur et des « créations » des IA.
Lorsque les images sont le « résultat d’une reproduction mécanique » : pas de copyright
Le mois dernier déjà, l’autorité avait rendu une décision qui concernait Midjourney, un système d’IA capable de générer des images complexes grâce à une base d’images provenant d’Internet et de Photoshop. Cette dernière annulait l’enregistrement auprès de l’USCO d’une bande dessinée, Zarya of the Dawn, dont toutes les images avaient été produites de manière automatisée par Midjourney. L’institut avait estimé que ces illustrations ne pouvaient pas être protégées. Ces images n’étaient pas le résultat d’un travail intellectuel et créatif humain, contrairement au texte et à l’arrangement des éléments écrits et visuels de la bande dessinée – qui ont pu, eux, être protégés. Le critère retenu : savoir si les contributions de l’intelligence artificielle sont « le résultat d’une reproduction mécanique » ou si elles reflètent « la propre conception mentale » de l’auteur. Tout dépend donc « du fonctionnement de l’outil d’IA et de la manière dont il a été utilisé pour créer l’œuvre finale », a précisé l’USCO.
Pas de travail intellectuel et créatif humain avec ChatGPT et DALL-E ?
L’institut, dans ses directives, a rappelé le principe de la protection du copyright : il faut un travail intellectuel et créatif humain. Le terme « auteur » exclut d’ailleurs les non-humains – comme en droit français. Conséquence : ni la technologie d’IA, ni l’entreprise qui l’a développé ne sont considérés comme des auteurs ou co-auteurs. L’administration a aussi mis les pieds dans le plat en faisant directement référence aux « technologies d’IA générative actuellement disponibles » comme ChatGPT et DALL-E. Avec ces dernières, « les utilisateurs n’exercent pas un contrôle créatif ultime sur la manière dont ces systèmes interprètent les instructions et génèrent des images ou du texte », a déclaré l’USCO. « Au lieu de cela, ces demandes fonctionnent davantage comme des instructions données à un artiste », a-t-il ajouté. Donc les textes et images créées par ces IA ne peuvent pas, a priori, être protégées au titre du copyright.
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Que se passe-t-il pour les œuvres mixtes, composées à la fois d’éléments qui relèveraient de la créativité humaine, et d’autres générés par l’IA ? La protection s’appliquera uniquement à la partie créée par l’homme, a tranché l’USCO. Nouveauté : les demandeurs doivent désormais indiquer dans leur demande d’enregistrement si un élément a été généré par l’IA, et expliquer les contributions de l’auteur (humain) à l’œuvre. L’institut a également reconnu qu’elle ne réglait pas toutes les questions dans sa communication. D’autres directives devraient suivre, dans les prochains mois.
Source :
Directives de l’U.S. Copyright Office du 15 mars 2023