Pourquoi les voitures électriques vont à la casse beaucoup plus vite que les thermiques ?

Pourquoi les voitures électriques vont à la casse beaucoup plus vite que les thermiques ?


Pour un grand nombre de voitures électriques, un dégât au niveau des batteries, même mineur, peut-être fatal et les conduire directement à la casse.

C’est une enquête de Reuters qui devrait faire beaucoup de bruit et qui pourrait aussi avoir des conséquences dans l’industrie automobile électrique. L’agence de presse britannique est partie du constat qu’au regard de ses parts de marché, le nombre de véhicules électriques dans les casses était particulièrement élevé. Pourquoi y a-t-il autant de voitures électriques à la « poubelle » alors qu’elles représentent moins de 15 % des véhicules en circulation ?

Des batteries trop chères à réparer

Reuters a mené son enquête des deux côtés de l’Atlantique et a constaté un nombre d’épaves électriques important de toutes marques. Qu’il s’agisse de Tesla, Hyundai, Renault, Peugeot, BMW ou encore Volkswagen, le constat est le même : des voitures électriques, même légèrement accidentées ou avec un faible kilométrage, sont envoyées au rebut à défaut d’être réparées.

D’après les conclusions de l’enquête, cela aurait à voir avec le prix des batteries sur ces véhicules et la politique en matière d’assurance. Explications. Sur une voiture électrique, la batterie est sans doute l’élément le plus cher. Dans certains cas, le pack de batteries peut atteindre 50 % du prix de vente, soit plusieurs dizaines de milliers d’euros. Or la réparation de ces batteries n’a rien d’évident, au contraire, il s’agirait d’une opération longue, coûteuse et qui ne serait pas sans quelques risques.

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Avant même d’envisager une éventuelle réparation, il convient d’effectuer un diagnostic et celui-ci est quasiment impossible sur les batteries des voitures électriques endommagées. La raison ? Les constructeurs ne permettent pas d’accéder aux données liées aux cellules, et cela, afin de préserver leur compétitivité et leurs secrets industriels. Dès lors, il est impossible, pour un réparateur ou tout autre tiers, d’estimer le coût d’une intervention. Dans ces cas, plutôt que d’engager des opérations coûteuses et risquées, les assureurs font le choix de mettre les voitures à la casse.

Interrogé par nos confrères de Reuters, Michael Hill, responsable des opérations chez Synetiq, le plus grand gestionnaire de casses en Grande-Bretagne, estime que 95 % des cellules de centaines de voitures électriques (et de milliers d’hybrides) sur ses sites seraient intactes et pourraient être réutilisées plutôt qu’être recyclées. Le souci ne concernerait pas que quelques voitures de temps en temps. Michael Hill parle d’une vingtaine de véhicules par jour qui terminent dans ses casses.

Un nouvel enjeu pour les constructeurs ?

Ce que l’enquête de Reuters pointe du doigt, outre l’attitude des assureurs, c’est également le rôle des constructeurs dans la fabrication ou l’intégration des batteries dans leurs voitures. Alors que certaines marques ont pris le sujet au sérieux et travaillent à rendre leur pack de batteries plus accessibles et plus facilement réparables, à l’image de Ford ou General Motors, d’autres font le chemin inverse. C’est le cas de Tesla notamment qui pour optimiser le fonctionnement des cellules 4680 du Model Y les colle entre-elles et au châssis. Le constructeur californien réduit ainsi ses frais de production, mais rend la réparation de l’accumulateur impossible.

Sur le SUV de Tesla, les batteries sont jugées irréparables. Et sur la Model 3 ? Elles sont beaucoup trop chères (environ 20 000 euros pour une intervention, sur un véhicule qui en coûte 45 000).

Des conséquences écologiques et économiques

Ce choix des constructeurs n’est évidemment pas sans conséquences pour l’utilisateur. On peut légitimement s’interroger sur l’intérêt « écologique » d’acheter un véhicule électrique compte tenu de ce risque. Au demeurant, cette donnée doit être prise en compte lorsqu’on compare l’impact environnemental d’une voiture électrique à une thermique. Quant à l’économie circulaire, tant vantée par les constructeurs de voitures électriques, son bien fondé mérite d’être interrogé. « Nous achetons des voitures électriques pour des raisons environnementales, mais un véhicule électrique n’est pas vraiment respectueux de l’environnement s’il faut le jeter sa batterie à la poubelle après une petite collision », explique Matthew Avery, directeur de recherche chez Thatcham Research, un cabinet de conseil en automobile.

Enfin, l’autre conséquence est à chercher du côté des primes d’assurance. Les professionnels du secteur augmenteraient leurs tarifs lorsqu’il s’agit d’assurer des véhicules électriques. Reuters évoque ainsi une augmentation de la franchise de l’ordre de 27 % aux États-Unis.

Face à ce phénomène, il existe bien sûr plusieurs solutions. Au niveau des institutions d’une part. L’Europe a récemment changé sa réglementation en matière de batteries pour les voitures électriques, mais sans imposer de contraintes aux fabricants. La Commission a encouragé l’adoption de « standards permettant de faciliter leur maintenance, les réparations et leur réutilisation ». Il n’est pas certain que cela suffise à changer l’attitude des constructeurs et pourtant leur capacité à ouvrir l’accès aux données des batteries pour faciliter le diagnostic et la réparation semble essentielle si on souhaite envoyer moins de voitures électriques à la casse.

Source :

Reuters



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