Votre donneur d’ordre est une administration française « concernée » par l’Afrique centrale. Il vous demande de lui présenter l’organisation paramilitaire russe Wagner, en Afrique de l’Ouest. Et de développer un plan pour s’en prémunir. Autre mission, proposée cette fois-ci par un acteur majeur français dans la construction de bateaux. Il veut en savoir plus sur la situation des législations en Guinée : que préconisez-vous pour rentrer sur le marché de la police des pêches ? Mi-mars, les étudiants du MBA en stratégie et intelligence économique de l’Ecole de guerre économique (EGE) étaient invités à réfléchir, avec des cas concrets, à des stratégies pour accéder à des marchés internationaux, en prenant en compte un contexte sécuritaire mouvant.
Dans le cadre de cet exercice, Paul (il préfère taire son nom de famille), 24 ans, s’intéresse à une société para-étatique à travers laquelle le Royaume-Uni étend son influence en Afrique francophone. « Quand j’ai rejoint l’Ecole de guerre économique, mes proches s’imaginaient que je rejoignais l’armée ! On pense souvent à la guerre comme un conflit armé, mais il s’agit plus globalement d’imposer ses idées par la force. L’intelligence économique, c’est collecter, analyser et exploiter une information pour prendre la meilleure décision », détaille l’ancien étudiant en administration économique et sociale et en droit des affaires. Il s’apprête à signer un contrat chez Airbus pour travailler dans l’industrie de l’armement.
Son camarade Amaury (son prénom a été modifié), 26 ans, note des similitudes entre le journalisme, son ancienne profession, et le travail exercé en cabinet d’intelligence économique (IE) : « Quand on fait un rapport de conformité, on enquête sur l’écosystème professionnel et social d’une entité. Il faut dissocier les sources fiables des autres. Si on veut aborder une personne difficile d’accès, on peut se renseigner sur ses hobbies. Elle aime le golf ? On va se documenter sur ce sport, fréquenter le même terrain, pour créer du lien. »
« Nouvelle forme de visibilité »
Le contenu des cours à l’EGE pourrait nourrir un roman d’espionnage… Mais c’est bien à la réalité du monde du travail que prépare l’école. Les étudiants apprennent à se servir des outils de veille utilisés par les entreprises pour une adaptation rapide une fois en poste. « Les professionnels de l’IE ne sont pas des sculpteurs de fumée. A l’EGE, les étudiants parlent argent et comptes d’exploitation. Ils savent identifier ce qui mérite d’être protégé au sein d’une entreprise et ce qui peut être intéressant à récupérer à l’extérieur », pointe Stéphane Volant, président du Club des directeurs de sécurité et de sûreté des entreprises (CDSE).
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