Les investigations pour cyber-harcèlement lancées depuis plus d’un an sur la base de plaintes de la patronne de l’agence d’influenceurs Shauna Events, Magali Berdah, s’accélèrent à Paris. Un juge d’instruction a « récemment » été saisi pour enquêter et a, d’ores et déjà, convoqué le rappeur Booba, que la papesse des influenceurs accuse d’être à l’origine d’une campagne de harcèlement en ligne à son encontre, a appris l’Agence France-Presse (AFP) mercredi 5 juillet de source judiciaire.
De son vrai nom Elie Yaffa, le rappeur de 46 ans est visé par de nombreuses plaintes de la part de la femme d’affaires, âgée de 41 ans et fondatrice de Shauna Events, agence spécialisée dans les relations entre les personnalités issues de la télé et les marques. Le juge d’instruction a convoqué le « Duc de Boulogne », originaire des Hauts-de-Seine, qui vit la majeure partie de l’année aux Etats-Unis, à une date non précisée par la source judiciaire.
« Elie Yaffa a hâte de s’expliquer, car il estime que dénoncer n’est pas harceler », a assuré à l’AFP un porte-parole de l’agence de communication représentant le rappeur. Booba « se considère comme un lanceur d’alerte » et « compte faire la preuve devant le juge d’instruction qu’il n’y a pas de cyber-harcèlement auprès de Magali Berdah et qu’il s’agit d’une stratégie de victimisation », a insisté le porte-parole. « On va pouvoir s’expliquer », a tweeté le rappeur.
Vingt-huit personnes prochainement jugées
Sur les réseaux sociaux, l’artiste s’est lancé, aux côtés d’un collectif « d’aide aux victimes d’influenceurs », dans une croisade contre ceux qu’il appelle les « influvoleurs », dénonçant de multiples arnaques à l’encontre des internautes. Dans sa ligne de mire depuis mai 2022 : Magali Berdah, cible d’attaques personnelles et de vidéos non sourcées. Il a aussi déposé plainte contre X pour dénoncer, selon lui, des pratiques commerciales trompeuses de Shauna Events, engendrant l’ouverture d’une enquête préliminaire en septembre 2022 à Grasse (Alpes-Maritimes).
Dans la foulée de tweets virulents, Magali Berdah avait déposé une première plainte, suivie de dizaines d’autres. Le pôle national de lutte contre la haine en ligne du tribunal judiciaire de Paris mène depuis juin 2022 des investigations. Booba avait déjà été convoqué dans ce cadre, sans se présenter. S’il ne se présentait pas à sa nouvelle convocation, le juge d’instruction pourrait émettre un mandat d’arrêt.
L’infraction de cyber-harcèlement a été créée par une loi de 2018. Elle peut être constituée dès lors que plusieurs personnes s’en prenant à une même victime savent que leurs propos ou comportements caractérisent une répétition, sans que chacune de ces personnes ait agi de façon répétée ou concertée. Outre l’instruction visant Booba, vingt-huit personnes vont être prochainement jugées devant le tribunal correctionnel de Paris pour cyber-harcèlement aggravé, menaces de mort ou encore menaces de crime à l’encontre de Mme Berdah, a précisé mercredi le parquet.
Première audience prévue pour la fin d’août
Ces vingt-huit prévenus ont « des profils variés », relève le ministère public : « Hommes et femmes, résidant partout en France, avec des casiers judiciaires vierges ou bien déjà connus des services de police pour violences et stupéfiants. » Leur sont reprochés des messages tels que « On va te brûler », « Va mourir salope », « Je vais t’violer salope »… adressés à Magali Berdah sur les réseaux sociaux.
Cette dernière « accueille avec soulagement le travail effectué par la justice en réponse au cyber-harcèlement massif dont elle est la cible depuis plus d’un an », ont réagi auprès de l’AFP ses avocats Antonin Gravelin-Rodriguez, Rachel-Flore Pardo et David-Olivier Kaminski. Une première audience dite de « mise en état » doit avoir lieu à la fin d’août pour ces vingt-huit prévenus. Par ailleurs, la plainte contre Twitter pour complicité de cyber-harcèlement, déposée par Mme Berdah en avril, est encore à l’étude au parquet de Paris.
Le conflit entre Booba et Magali Berdah a été fortement médiatisé. Le marché des influenceurs est très critiqué depuis plusieurs mois et le Parlement a voté une régulation du secteur en juin. Certaines publications du rappeur ont reçu un large écho : en avril par exemple, deux parlementaires ont signalé à la justice des faits reprochés à l’influenceur Dylan Thiry, qui avaient été dénoncés dans des vidéos publiées par Booba.