Une réunion de « trilogue » autour de l’Artificial Intelligence(AI) Act était inscrite à l’agenda, mardi 18 juillet. Dans ce rituel institutionnel propre à Bruxelles, le Parlement européen, la Commission et le Conseil, qui représente les Etats membres, cherchent à trouver un compromis autour d’un projet législatif, en l’occurrence le règlement européen sur l’intelligence artificielle. Cette phase de négociation, prévue pour durer plusieurs mois, s’ouvre alors que, depuis plusieurs semaines, des critiques se font entendre, notamment en France, sur la dernière version de l’AI Act, jugée trop restrictive.
« En l’état, la régulation a un risque fort de gêner l’innovation en Europe », avait lancé le 14 juin, au salon VivaTech, Arthur Mensch, le fondateur de Mistral AI, une start-up ayant levé 105 millions d’euros pour fabriquer des modèles de traitement du langage concurrents de ceux des américains Google, Meta ou OpenAI, le créateur du robot conversationnel ChatGPT. Fait marquant, Emmanuel Macron, présent sur scène, avait abondé dans ce sens : « Je partage votre inquiétude », a déclaré le président de la République.
Les critiques portent sur les obligations ajoutées à l’AI Act – dans la version votée par le Parlement le 14 juin – afin d’encadrer les modèles d’IA ne relevant pas d’un usage spécifique (le reste du texte régule les logiciels en fonction du risque posé, jugé plus grand pour une application de médecine ou d’automobile que pour une interface conseillant un client sur un site d’e-commerce).
Pour les intelligences artificielles « à finalité générale », capables de produire du texte pour un poème, mais aussi du code informatique pour une centrale nucléaire, les fabricants sont tenus d’évaluer et d’atténuer les risques potentiels pour la santé, la sécurité, les droits fondamentaux ou la démocratie. Dans le même esprit, les interfaces d’IA « générative », qui, comme ChatGPT ou Midjourney, proposent au public de créer du texte ou des images, doivent, elles, faire preuve de transparence sur les données utilisées pour leur entraînement, en précisant les contenus soumis au droit d’auteur.
« Exercice de lobbying »
« Le texte applique aux modèles de traitement du langage les obligations réservées aux applications les plus risquées, sans tenir compte de leur usage ou de leur puissance », regrette Cédric O, ex-secrétaire d’Etat au numérique devenu fondateur et conseiller de Mistral AI, dont les modèles seront, selon lui, classés à finalité générale. Chez LightOn, autre créateur français de grands modèles de langue, le fondateur, Laurent Daudet, se dit également « inquiet ». L’allemand Aleph Alpha a jugé que se conformer à l’AI Act pourrait prendre trop de temps aux dirigeants de jeunes pousses et dissuader certains investisseurs.
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