Les identités numériques sont l’un des piliers de la numérisation de nos vies quotidiennes. Demain, avec le nouveau règlement eIDAS 2.0 de la Commission européenne, chacun pourra enregistrer son identité numérique sur son smartphone et l’utiliser en quelques clics de manière intuitive partout dans l’Union européenne (UE) et dans de nombreux cas d’usage : ouverture d’un compte bancaire, location d’une voiture ou d’une trottinette électrique, jeux en ligne, consultation de son dossier médical, etc. Toutefois, si l’entrée en vigueur de eIDAS 2.0 est attendue dans les prochaines années, plusieurs pays européens ont déjà adopté des stratégies d’identité numérique.
En 2017, les principales banques et entreprises de télécommunications belges ont formé un consortium et lancé l’application mobile Itsme. Adoptée aujourd’hui par 80 % de la population belge, utilisée par plus de 1 000 plates-formes du secteur public et plus de 250 entreprises, Itsme permet de s’identifier via un mobile, de signer toutes sortes de documents (contrats de travail, baux, etc.) et de servir dans de nombreuses applications liées à la finance et aux télécommunications. La confiance des citoyens belges dans les secteurs des banques et des télécommunications, ainsi qu’une expérience utilisateur optimale, expliquent son succès.
Le gouvernement belge a par ailleurs introduit le portefeuille d’identité MyID. be en tant que solution d’Etat, version numérique de la carte d’identité nationale qui peut être utilisée pour les démarches administratives (demande de permis de conduire, permis de construire, etc.). Développé en conformité avec le règlement eIDAS 2.0 et déployé en 2023, MyID. be devrait venir compléter Itsme, ou, selon le souhait de l’Etat belge, la remplacer. Mais on peut se demander pourquoi une solution déjà largement plébiscitée par le public se trouverait évincée, plutôt que de lui apporter les évolutions nécessaires, au risque de perdre l’adhésion massive de la population.
Devant les réseaux sociaux
Les plus grandes banques suédoises et danoises ont créé au début des années 2000 un consortium pour développer la plate-forme BankID. Trois ans plus tard, en 2003, sous l’impulsion du gouvernement et avec le développement d’un cadre juridique adapté, une première version de la solution était disponible. Enrichie au cours du temps, cette plate-forme est aujourd’hui l’application la plus utilisée par les Suédois (80 % y recouraient en 2018), devançant tous les réseaux sociaux.
L’étroite collaboration entre l’Etat, les banques et le secteur privé explique ce succès. Au fil des ans, tous les participants ont su partager leur savoir-faire et leurs expériences, de quoi développer une grande variété d’usages : gestion de cartes de crédit, de comptes bancaires, services du secteur public, accès aux données médicales, signature de contrats, etc. Leur approche pragmatique consistant à recourir à des infrastructures déjà existantes a également facilité la mise en œuvre. Ce partenariat public-privé particulièrement efficace pourrait servir de modèle à d’autres usages, hors secteur financier.
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