Sous-titrages, synthèse vocale, commandes visuelles… Les outils numériques de compensation facilitent le quotidien des personnes en situation de handicap. Grâce à des applications ou des logiciels, elles peuvent désormais lire, regarder un film, se déplacer, communiquer. Mais pour ce qui est des services numériques proposés par les entreprises et les administrations, le niveau d’accessibilité est « déplorable » en France, constate Luce Carevic, du cabinet Access42, qui les accompagne depuis dix ans dans la mise en place et le suivi de leur politique d’accessibilité.
Résultat, il reste difficile pour les personnes en situation de handicap de s’intégrer dans le marché du travail. « Les outils numériques n’ont pas permis de développer notre insertion professionnelle autant que nous l’espérions, en raison du manque d’accessibilité des contenus et des services numériques. Nous sommes exclus de franges entières de la société », déplore Manuel Pereira, non-voyant, responsable du pôle accessibilité à l’association Valentin-Haüy, qui agit en faveur de l’autonomie des personnes déficientes visuelles.
En effet, en France, si 1,1 million de personnes handicapées travaillent, plus de 450 000 autres restent sans emploi. Leur taux de chômage est presque deux fois plus important que celui de la population générale (12 % contre 7 %). Elles sont aussi davantage concernées par l’illectronisme, qui touchait 15,4 % de la population en 2021 selon l’Insee, et elles sont nombreuses à se heurter à la dématérialisation des services publics. Une situation qui entrave leur route vers l’emploi.
Une situation absurde
Pourtant, certains métiers du numérique, en tension, offrent de nombreuses possibilités. Responsable cybersécurité, analyste de trafic, chargé de référencement, ingénieur cloud et réseaux… D’ici à 2027, 230 000 postes seront à pourvoir dans ce domaine. « La plupart aboutissent à un CDI, les conditions de travail sont attractives, et pourtant, l’an dernier, 85 000 sont restés vacants », regrette Françoise Farag. La présidente de la commission inclusion de Numeum, l’un des syndicats professionnels du secteur, souligne : « La situation est absurde : deux mondes se côtoient sans se rencontrer ou si peu, alors qu’ils pourraient s’enrichir mutuellement. Il faut que cela change ! »
Les solutions sont plurielles. D’abord, il est essentiel d’augmenter le niveau de formation des personnes en situation de handicap. « Elles ont tendance à s’autocensurer, car le secteur requiert un niveau bac + 2 à bac + 5, voire plus. Il faut donc les aider à oser se diriger vers ces études », exhorte Françoise Descamps-Crosnier, présidente du Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP). L’enjeu est d’autant plus important que même des métiers traditionnels – comme garagiste, imprimeur ou cariste – nécessitent de maîtriser des outils numériques.
Il vous reste 45% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.