Les systèmes d’intelligence artificielle (IA) générative vont être de plus en plus au cœur de notre économie et de nos sociétés. Ils doivent être explicitement régulés par le règlement européen sur l’IA au moment où une course effrénée, et à bien des égards imprudente, se déchaîne. La France et l’Europe peuvent prendre toute leur place dans le déploiement et l’économie de l’IA, à condition de capitaliser sur leurs forces : la protection des droits fondamentaux, l’industrie de pointe et l’IA de confiance.
Les systèmes d’IA générative sont développés en deux phases principales : d’abord l’élaboration d’un modèle par apprentissage à partir de très grandes quantités de données et de capacités importantes de calcul, appelé modèle de fondation ou modèle génératif, puis, dans une seconde phase, sa mise en œuvre dans un système. Celui-ci peut être à usage général, comme ChatGPT, qui produit des réponses à partir de requêtes, ou adapté à différents domaines dans des secteurs industriels, après inclusion de données qui leur sont spécifiques.
Les modèles de fondation sont notoirement peu fiables et peu robustes. Même leurs concepteurs ne comprennent pas précisément leur fonctionnement. Cependant, ils sont puissants, du fait qu’ils incluent une quantité d’informations phénoménale, et sont ainsi devenus le socle sur lequel se construit un foisonnement de systèmes et d’applications.
Faire peser le fardeau réglementaire presque exclusivement sur les fournisseurs des systèmes de la seconde phase, qui construisent et déploient des solutions sur la base de modèles de fondation, n’est ni équitable ni souhaitable. Ce serait même néfaste pour l’innovation industrielle française et européenne. Les fournisseurs de ces modèles de fondation, quelle que soit leur nationalité, doivent aussi prendre leur part de responsabilité dès les phases de conception.
Réduction des risques
Or, c’est l’enjeu actuel des trilogues, ces négociations qui se déroulent entre les trois instances de l’Union européenne – le Conseil, la Commission et le Parlement – pour aboutir à la version finale du règlement européen sur l’IA. Principalement en cause, la position de la France, de l’Allemagne et de l’Italie concernant des articles votés en juin 2023 par le Parlement européen afin de jeter les bases d’un encadrement du développement et du déploiement des modèles de fondation, dont les effets pourraient aller jusqu’à menacer nos démocraties. En effet, ces modèles sont susceptibles de produire de fausses informations et de réaliser des actions non désirées, pouvant engendrer un tsunami de désinformation, de fraudes et d’accidents en matière de cybersécurité dans les années à venir.
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