« Déposez votre CV et gagnez 100 000 euros et plein d’autres lots ! » En juin 2022, faute de recevoir suffisamment de candidatures, le cabinet de recrutement Lynks Partner lançait une loterie alléchante. Pour tenter sa chance, il suffisait de s’inscrire sur le site dédié et d’y inviter deux autres candidats titulaires d’un bac + 2. Le tirage au sort devait avoir lieu après l’enregistrement de 1 million de CV.
Pour tenter de se démarquer, de nombreuses entreprises innovent dans leur processus de recrutement dans une démarche d’« aller vers », c’est-à-dire qui rompt avec l’idée que le candidat doit postuler et considère que l’entreprise doit aller à sa rencontre pour le convaincre de la rejoindre. Mais cette démarche doit être particulièrement bien ciblée, car l’opération est également un coup de dés pour l’entreprise : à peine six mois après le recrutement-loto de Lynks Partner, le tribunal de commerce de Paris a prononcé l’ouverture d’une liquidation judiciaire du cabinet.
Les offres d’emploi ont du mal à trouver leur public, tant les projets de recrutement sont nombreux. Publiée en avril, l’étude annuelle de Pôle emploi sur les « Besoins en main-d’œuvre » montre que 61 % des employeurs anticipaient des difficultés pour recruter cette année, un nombre en augmentation de 3,1 points par rapport à 2022. Premier motif invoqué, le nombre insuffisant de candidats (pour 85 % des entreprises), avant l’inadéquation des profils (79 %) des postulants. Pour les attirer malgré un marché qui ne leur est pas favorable, les entreprises n’hésitent plus à aller directement chercher les candidats, dans la rue ou sur les places de village.
Rompre avec l’aspect formel de l’entretien lève des freins. « Dans la rue, on trouve des candidats qui ne se trouvent pas légitimes pour postuler lors d’un processus classique. La relation s’inverse, car nous montrons que nous avons besoin d’eux autant qu’ils ont besoin de nous », indique Nicolas Morby, fondateur, en 2020, d’Ethypik, société de recrutement dont la spécialité est de démarcher des candidats sur les places publiques.
Selon le dirigeant, 65 % des profils de sa base de données sont des personnes éloignées du marché, qui ne sont inscrites ni à Pôle emploi, ni au sein des missions locales, ni sur les réseaux sociaux liés à l’embauche.
La rue pour recruter des salariés
De la même manière, l’Oise s’est dotée, en 2016, d’un bus itinérant, allant de communes en villages pour approcher des habitants qui n’ont pas toujours la possibilité de se déplacer en transports en commun. Là aussi, les résultats sont probants : « Une personne reçue en entretien individuel par le conseiller en insertion professionnelle sur deux retrouve le chemin de l’emploi, de la formation ou crée son entreprise », pointe le département, qui a inauguré un cinquième bus en 2022.
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