Le logiciel Google Translate veut promouvoir les langues africaines

Le logiciel Google Translate veut promouvoir les langues africaines


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« Mbote boni ? » « Nazali malamu mpenza. » Les amateurs de lingala, une langue parlée par 45 millions de personnes de l’Angola au Soudan du Sud en passant par la République démocratique du Congo (RDC), peuvent désormais se demander des nouvelles via Google Translate. L’outil de traduction du géant américain a été mis à jour mi-mai avec 24 nouvelles langues, dont dix principalement utilisées sur le continent africain : le bambara (Mali), l’ewe (Ghana, Togo), le krio (Sierra Leone), le lingala (Afrique centrale), le luganda (Ouganda), l’oromo (Ethiopie), le sepedi (Afrique du Sud), le tigrinya (Ethiopie, Erythrée), le tsonga (Afrique du Sud, Mozambique) et le twi (Ghana).

Des idiomes qui comptent près de 167 millions de locuteurs et viennent s’ajouter à l’amharique (Ethiopie), au swahili (Afrique de l’est) ou encore au yoruba (Nigeria), déjà intégrés dans le service de traduction.

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Cette mise en valeur des langues africaines s’inscrit dans une stratégie de déploiement du géant américain en Afrique. En 2021, il a affirmé vouloir promouvoir la transformation digitale du continent en y investissant 1 milliard de dollars (940 millions d’euros) sur cinq ans. En avril, l’entreprise californienne a ouvert un centre de recherche et de développement à Nairobi, au Kenya. Elle avait déjà inauguré, en 2019, un laboratoire dédié à l’intelligence artificielle à Accra, au Ghana.

La dernière actualisation du logiciel Google Translate avait permis de l’enrichir de cinq langues, dont le kinyarwanda (Rwanda), en 2020. D’après Google, le critère privilégié pour effectuer cette nouvelle sélection a été le nombre de locuteurs. « Cela nous a naturellement conduits à nous focaliser sur le continent africain », explique Isaac Caswell, un ingénieur de Google qui a travaillé sur le projet. Le groupe se targue également de soutenir ainsi des communautés linguistiques jusqu’à présent négligées par la technologie.

« Diversité linguistique »

L’outil de Google ne comprend toutefois qu’une fraction des langues parlées sur le continent, estimées à plus de 2 100 par le Laboratoire langage, langues et cultures d’Afrique (LLCAN) du Centre national de recherche scientifique (CNRS). L’offre mondiale du service de traduction américain concerne toujours en priorité les langues européennes, « laissant largement de côté les régions à forte diversité linguistique, comme l’Afrique et les Amériques », admettait le groupe dans un communiqué le 11 mai.

Selon le projet linguistique collaboratif Glottolog, une plateforme utilisée par le laboratoire du CNRS pour ses recherches, près de trois langues africaines sur cinq seraient menacées ou auraient disparu à ce jour. Selon Valentin Vydrin, chercheur au LLACAN et spécialiste du bambara, le niveau de traduction proposé par le logiciel de Google est « très insuffisant par moments ». Même si, reconnaît-il, l’ajout de ces dix nouvelles langues africaines est une « étape incontournable pour les promouvoir ».

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Car ces idiomes sont encore surtout parlés et peu écrits. Pour les Etats, leur mise en valeur implique des investissements coûteux, souligne Valentin Vydrin : « Il faut former des enseignants de tous les niveaux, imprimer des manuels scolaires, financer des cours d’alphabétisation et l’enseignement en langues nationales à l’école. »

Enseignant à l’Institut des langues orientales à Paris (Inalco), le chercheur a vu en vingt-cinq ans les motivations de ses étudiants évoluer. « La génération qui a vécu la décolonisation est maintenant à la retraite, note-t-il, et les jeunes Français s’intéressent beaucoup moins aux langues régionales africaines. » Les promotions auxquelles il enseigne le bambara l’apprennent pour des raisons plus personnelles, liées à leur histoire familiale. « Mes étudiants sont des ressortissants des pays qui parlent le bambara ou des immigrés de deuxième ou troisième génération. Certains ne parlent plus leurs langues et souhaitent revenir aux racines, d’autres parlent un peu avec leurs parents mais de façon minimale. » Reste à voir si l’arrivée de la technologie, avec la multiplication de logiciels de traduction, est de nature à changer la donne.



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