C’est une première mondiale : Pavel Durov, le PDG du réseau social Telegram, a été interpellé, samedi 24 août, à son arrivée en France dans le cadre d’une enquête sur la manière dont son application a pu être utilisée par des criminels et des terroristes. Jusque-là, cette application très particulière avait pu se développer dans une certaine impunité, malgré le refus de son créateur de collaborer avec les gouvernements, aussi bien de pays totalitaires que démocratiques.
Un fonctionnement assez unique
Est-ce une messagerie, un réseau social ou une plate-forme de blogs ? Telegram est un peu les trois à la fois. L’application mêle un service d’échange de messages assez classique, similaire à WhatsApp ou Messenger, et un système de groupes de discussions et de chaînes. Il est possible d’y créer un canal où seul l’administrateur peut publier des messages, avec ou sans commentaires, tout comme des groupes de discussions qui peuvent rassembler jusqu’à 200 000 personnes.
Ces multiples fonctionnalités en font une application « couteau suisse », souvent centrale dans la vie de ses utilisateurs, qui s’y informent, y discutent avec leurs proches ou y publient de longs messages pour leurs abonnés. Des messageries comme WhatsApp ont, elles aussi, tenté d’introduire des fonctionnalités de « canaux », mais ceux-ci restent bien moins utilisés que ceux de Telegram.
Une application très populaire… dans certains pays
Avec plus de 900 millions d’utilisateurs revendiqués dans le monde, Telegram est un poids lourd des réseaux sociaux, même s’il reste loin derrière WhatsApp (trois milliards d’utilisateurs). Ce chiffre cache de fortes disparités selon les pays : omniprésente en Russie, en Ukraine et dans la plupart des pays de l’ex-URSS, l’application est nettement moins utilisée en Europe de l’Ouest et dans le reste du monde. En France, son nombre d’utilisateurs est estimé à environ un million.
Cette présence plus faible dans l’Union européenne est cependant aussi un atout pour Telegram : avec, officiellement, 41 millions d’utilisateurs actifs en Europe, le service n’atteint pas le seuil de 45 millions qui le placerait parmi les « très grandes plates-formes », qui ont des obligations spécifiques de modération, assorties de lourdes amendes en cas de manquements, au titre du règlement européen Digital Services Act (DSA).
Une modération quasi absente
C’est, peut-être, la principale spécificité de Telegram : l’application se vante de ne « jamais censurer » ses utilisateurs, collabore très peu avec les réquisitions judiciaires et se pose en championne de la liberté d’expression. Côté pile, cela l’a poussée à investir techniquement dans des technologies rendant son blocage très difficile, ce qui en fait l’un des rares outils de communication aisément disponibles dans des pays comme l’Iran, et un service prisé des opposants politiques dans des Etats totalitaires, Russie comprise.
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