Il était une fois, un jeu vidéo qui se déroule dans un livre pour enfants. Sur ses pages sont dessinés les paysages colorés d’une contrée baptisée Mojo, dont la population est strictement représentative des canons du genre : on y trouve des magiciens, des trolls ou des animaux qui parlent… et, sans surprise, un héros chevaleresque toujours prêt à défendre son royaume.
Bonnet phrygien sur la tête, épée à la main et affublé du surnom de « vaillant petit page », le jeune personnage part à la poursuite de Ragecuite, un magicien maléfique qui veut prendre le pouvoir. Cette quête le conduit à occire des monstres rondouillards, résoudre de nombreux casse-tête et venir à bout de drôles de mini-jeux variés.
Pas question cependant de tourner ici les contes en dérision, mais plutôt de leur rendre un hommage tendre et malicieux – comme a su le faire en son temps le film Princess Bride (1987). Châteaux et marais poisseux, escargot poète et étoile de mer pirate… Tout est fait pour convoquer les souvenirs de l’enfance et nous placer dans un état d’émerveillement permanent.
Briser le quatrième mur
C’est à un autre film propice aux rêveries enfantines, Toy Story (1995), que l’on ne manque pas de penser quand arrivent les premières péripéties : utilisant un pouvoir baptisé « méta-magie », le vilain Ragecuite boute le héros de papier hors de son livre. Sonné, notre petit page atterrit sur le bureau en désordre où l’ouvrage à son nom a été déposé par son jeune propriétaire. Peu perturbé par le trouble existentiel qu’aurait pu susciter une telle découverte, le jeune héros part en expédition sur ce bureau jonché de crayons, de jouets ou de petits monstres qui se sont également échappés de notre conte de fées.
Bientôt, il se montre capable de voyager à sa guise entre les deux mondes, dont chacun offre une perspective différente : celui du livre est fait de dessins en deux dimensions, tandis que celui de la chambre est en trois dimensions. Pour avancer dans notre quête, il faudra vite naviguer entre les deux.
S’il n’est pas sans rappeler les deux univers emboîtés, l’un plat et l’autre en volume, de The Legend of Zelda : A Link Between Worlds (2013), cette astuce des deux mondes – la grande réussite de ce titre – réussit cependant à imposer son propre motif : celui de la contamination du monde extérieur par un personnage de fiction. Par là même, la première production du studio australien All Possible Futures offre une belle métaphore sur les pouvoirs de l’imagination.
Les enfants en ligne de mire
Malgré la sophistication de son dispositif interdimensionnel, Le Vaillant Petit Page ne perd jamais de vue sa simplicité d’approche. La difficulté des combats est peu relevée, il est possible d’obtenir des indices pour résoudre les puzzles les plus complexes, les mini-jeux les plus coriaces sont optionnels et la progression est de manière générale très guidée – peut-être même trop, jugeront les joueurs aguerris.
All Possible Futures cherche ainsi à séduire un public familial, depuis les collégiens jusqu’aux adultes amateurs d’expérience sans prise de tête. Cette parenthèse de douceur est toutefois ponctuée de pics de difficulté qui peuvent déstabiliser, un peu comme si l’on trouvait un piment caché dans un chou à la crème.
Le Monde
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D’autres instabilités, d’ordre technique, ont atténué la forte impression procurée par le parti pris esthétique et le rythme trépidant de cette aventure : la version de test fournie au Monde par l’éditeur souffrait de quelques bugs bloquants sur le dernier quart de l’aventure. C’est dommage, car ce petit page a le profil d’un grand.
L’avis de Pixels
On a aimé :
- le va-et-vient entre les aventures dans le livre (en 2D) et hors de ses pages (en 3D) ;
- une direction artistique adorable et pétrie de références ;
- la traduction française des plus réussies.
On a moins aimé :
- quelques pics de difficulté inattendus dans un jeu généralement sans prise de tête ;
- plutôt que des options d’accessibilité pour simplifier le jeu, on aurait voulu pouvoir le lancer dans un mode « difficile » ;
- notre version de test nous a confrontés à des bugs bloquants.
C’est plutôt pour vous si :
- vous avez le syndrome de Peter Pan.
Ce n’est plutôt pas pour vous si :
- vous êtes plutôt du côté du Capitaine Crochet.
La note de Pixels
Il était trois fois/quatre