Pour apporter une connectivité depuis l’espace, il ne suffit pas de lancer en masse des satellites et constituer des méga constellations. Il est également nécessaire de disposer de stations au sol, ces grandes antennes paraboliques qui envoient des commandes aux satellites pour les piloter et rapatrient leurs données. C’est sur ce créneau qu’a été créée en octobre 2023 la startup française Skynopy.
Selon elle, l’infrastructure au sol est la grande oubliée de l’industrie spatiale de ces dernières années.
« Troisième pilier de la chaîne de valeur après le lanceur et les satellites, le segment sol a été en effet longtemps sous-estimé par les politiques publiques, mais aussi les acteurs du secteur, alors même qu’il est essentiel au rapatriement des données et représente plus de 20 % du coût d’une mission », explique-t-elle dans un communiqué.
Levée de fonds de 3,1 millions d’euros
Skynopy a été fondée par Pierre Bertrand, PDG, et Antonin Hirsch, directeur technique. Ils étaient tous deux des anciens dirigeants de Loft Orbital. Cette startup franco-américaine qui développe des satellites partagés et vendus « as a service » qui a levé un total de 200 millions de dollars de fonds.
Les deux compères veulent aujourd’hui appliquer ce modèle économique de l’infrastructure as a service au segment sol. C’est-à-dire fournir aux opérateurs un réseau mutualisé d’antennes terrestres nécessaires pour télécharger les données des satellites en orbite sans qu’ils aient besoin d’investir dans leurs propres installations. Un enjeu essentiel alors que l’industrie spatiale et ses méga constellations dont, en premier celle Starlink, génère un volume exponentiel de données.
La jeune pousse francilienne ne perd pas de temps. En juin, elle levait 3,1 millions d’euros auprès du fonds paneuropéen Heartcore Capital, de Kima Ventures, de Better Angle et de Bpifrance. Mi-septembre, elle concluait un deal avec Amazon Web Services (AWS) pour exploiter un réseau de 12 stations au sol de l’hyperscaler.
Vendredi 18 décembre, Skynopy annonçait, cette fois, un partenariat avec une autre startup française du new space, Kinéis. Cette société toulousaine s’est spécialisée dans IoT satellitaire. Elle prévoit de lancer une constellation de 25 nanosatellites, non pas pour relier des êtres humains mais n’importe quel objet connectée dans le monde.
Enjeu de souveraineté
Avec sa constellation de satellites poids plus (28 kg), lancés en orbite basse, à 650 km d’altitude, et son réseau de 20 stations au sol, Kinéis permettra de transmette les données d’objets fixes ou mobiles situés en dehors des zones de couverture des réseaux terrestres. La transmission se fera, selon elle, en quasi temps réel, à bas débit et avec une très faible consommation d’énergie.
Choix des antennes et des sites d’installation, documentation technique, obtention des licences… Cette collaboration permettra à Skynopy de bénéficier du savoir-faire et de l’expertise de Kinéis dans le domaine de l’infrastructure sol d’antennes. Ce partenariat franco-français répond aussi à un enjeu de souveraineté.
Selon le site ViPress.net, infrastructure de données est aujourd’hui largement dominée par les hyperscalers du cloud. « Actuellement, plus de 95 % des données spatiales européennes transitent par des infrastructures américaines, ce qui pose des enjeux majeurs de souveraineté et de sécurité des données, notamment par rapport au Cloud Act ».
Avec un maillage d’une quinzaine d’antennes, Skynopy compte parmi ses premiers clients un autre pépite toulousaine. Hemeria conçoit des systèmes et véhicules spatiaux pour des entreprises du civil et de la Défense.