La Commission européenne a décidé d’ouvrir une enquête visant Temu, la plateforme de produits high tech et de prêt-à-porter à prix cassés, après de nombreuses plaintes, alertes et demandes d’organisations et de pays européens formulées contre la place de marché.
Après plusieurs questions et mises en garde, la Commission européenne a décidé d’ouvrir une enquête visant Temu, le géant de l’e-commerce chinois, ce jeudi 31 octobre. L’exécutif européen souhaite s’assurer, dans le cadre du règlement européen sur les services numériques (DSA), « que les produits vendus respectent les normes de l’UE et ne mettent pas en danger les consommateurs ». L’objectif est de garantir « que chaque plateforme, y compris Temu, respecte pleinement les lois qui garantissent la sécurité et l’équité de notre marché européen pour tous », a expliqué Margrethe Vestager, la commissaire à la Concurrence, citée dans le communiqué de l’UE.
En retour, Temu a déclaré « prendre très au sérieux ses obligations relatives au règlement sur les services numériques et investir continuellement pour protéger les intérêts des consommateurs ». Un porte-parole a rappelé que l’entreprise coopérait pleinement avec la Commission.
Produits contrefaits, dangereux, dark patterns…
La société d’origine chinoise, qui s’est lancée sur le marché européen en avril 2023, avait jusqu’à la fin du mois dernier pour se conformer aux normes imposées par le DSA, le règlement sur les services numériques, aux très grandes plateformes. Parmi ses nouvelles obligations figurait notamment l’analyse des « risques systémiques » provoqués par la plateforme ou la fin du recours aux « dark patterns », les interfaces trompeuses destinées à manipuler ou tromper les utilisateurs. Temu est aussi censée supprimer le contenu illégal et vérifier l’identité des vendeurs de sa place de marché – avec notamment tout un pendant sur les objets contrefaits ou dangereux.
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Et ce sont justement ces points qui exacerbaient les critiques de certains États européens et associations. En septembre dernier, la France, l’Allemagne, l’Autriche, la Pologne, le Danemark et les Pays-Bas avaient adressé une lettre au Conseil (la représentation des 27 pays de l’UE), demandant « de contraindre les fabricants et les plateformes de commerce électronique – y compris ceux des pays tiers – à respecter les réglementations européennes applicables » rapportait Contexte.
La place de marché, qui offre des produits high tech et du prêt-à-porter made in China à prix cassés, est aussi accusée d’ « oublier régulièrement de fournir aux consommateurs des informations cruciales sur les vendeurs des produits. Elle n’est donc pas en mesure d’indiquer si le produit répond aux exigences de l’UE en matière de sécurité des produits », dénonçait par exemple le Bureau européen des unions de consommateurs (BEUC), dans un communiqué.
En avril dernier, le gouvernement allemand a, outre Rhin, demandé que des mesures soient prises à l’encontre de Temu, en raison de « nouvelles et constantes incitations à l’achat manipulatrices » du site. « Des jeux, des roues de la fortune, des comptes à rebours, etc. suggèrent des réductions incroyables et des bonnes affaires » – à tort, regrettait Christiane Rohleder, la secrétaire d’État à la protection des consommateurs, dans les pages du média allemand Table Media.
En France enfin, l’UFC Que Choisir avait, dans son enquête sur les dark pattern, placé Temu en tête des plateformes les plus utilisatrices de dark pattern, à l’image de ces prix en promotion qui sont masqués, jusqu’à ce qu’ils soient ajoutés au panier.
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Il s’agit de la seconde enquête visant une plateforme d’e-commerce chinoise
Dans son enquête, la Commission va justement se pencher sur ce point. Car si Temu est soupçonnée de faire trop peu « contre la vente de produits non conformes, dans l’UE », elle est aussi visée pour ses dark patterns qui rendraient la plateforme addictive, via ses programmes de récompenses similaires à des jeux. Ces derniers « pourraient avoir des conséquences négatives sur le bien-être physique et mental d’une personne », écrit la Commission.
Bruxelles a désormais plusieurs mois devant elle pour enquêter – aucune date limite n’a été donnée. Temu risque une amende plus que salée, à savoir 6 % du chiffre d’affaires annuel mondial de l’entreprise. Il s’agira la deuxième enquête ouverte par Bruxelles contre une plateforme chinoise, dans le cadre du DSA. En mars dernier, l’exécutif européen avait ouvert une enquête visant AliExpress.
Comme nous vous l’expliquions dans cet article, Bruxelles cherche à mieux réglementer les places de marché chinoises, dont Temu, notamment en menant une vaste réforme du droit des douanes. Outre le fait de plus taxer les colis provenant de Temu, Shein ou AliExpress, l’UE compte aussi adopter d’autres mesures pour contraindre les plateformes à mieux respecter les normes européennes environnementales, de sécurité, de droit du travail et de droit de la propriété intellectuelle. Faire appliquer le DSA en fait bien partie.
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Source :
Commission européenne