Stéphane Richard, PDG d’Orange depuis 2011, quittera ses fonctions au plus tard fin janvier, après sa condamnation, hier, mercredi 24 novembre, dans l’affaire de l’arbitrage controversé entre Bernard Tapie et le Crédit Lyonnais, a annoncé le groupe dans un communiqué, à l’issue de la réunion de son conseil d’administration, qui s’était ouverte hier à 18h.
C’est un départ légèrement anticipé, puisque son mandat à la tête du groupe arrivait initialement à son terme mi-2022, même si Stéphane Richard entendait briguer un nouveau poste, à l’issue de son troisième mandat, celui de président du groupe, laissant la direction générale à une autre personne. Cette ambition a été brisée net par sa condamnation par la cour d’appel de Paris à un an d’emprisonnement avec sursis et à 50.000 euros d’amende.
Son départ « sera effectif à compter de la mise en place d’une nouvelle gouvernance et au plus tard le 31 janvier 2022 », a précisé l’entreprise, ajoutant que Stéphane Richard continuait d’exercer ses fonctions jusqu’à ce départ.
Rattrapé par le passé
En 2018, le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, avait prévenu qu’en cas de condamnation, Stéphane Richard devrait remettre son mandat, alors que le géant français des télécoms a pour premier actionnaire l’État, avec plus de 20% du capital.
« Pour toutes les entreprises publiques qui sont sous ma responsabilité de ministre de l’Économie, les règles du jeu doivent être claires : s’il y a condamnation du dirigeant, il y a départ immédiat du dirigeant », avait déclaré Bruno Le Maire.
Après une relaxe générale en juillet 2019, la cour d’appel a estimé mercredi que l’arbitrage, qui avait octroyé 403 millions d’euros à Bernard Tapie et a depuis été annulé au civil, était bien « frauduleux » en ce qu’il était biaisé dans le sens des intérêts de l’homme d’affaires.
Stéphane Richard, 60 ans, qui était à l’époque directeur de cabinet de la ministre de l’Economie Christine Lagarde, a été reconnu coupable de complicité de détournement de biens publics.
« Les accusations de complicité de détournement de fonds publics sont sans aucun fondement et ne sont basées sur aucune preuve. Je les rejette totalement et vais me pourvoir en cassation », a-t-il annoncé immédiatement.
Interviewé sur France Inter ce matin, Stéphane Richard laissait entendre à demi-mot sa déception d’avoir été pris dans un dossier à la fois très technique et politique, où il a dû prendre des décisions imposées par des supérieurs politiques.
Interrogé sur ces points, il indiquait également que sa plus grande fierté et réussite à la tête d’Orange était d’avoir réussi à reconstruire le dialogue et à apaiser une société qui avait trouvé à feu et à sang. Stéphane Richard, diplômé d’HEC et de l’ENA, a en effet rejoint le groupe Orange en septembre 2009, alors secoué par une réorganisation violente et marqué durablement par des vagues de suicides.
Le temps de l’apaisement
Cet apaisement qu’il a su porter, et consolider au fil de ses différents postes et de son ascension au sein du groupe, dont il est devenu directeur général en juin 2010, et enfin PDG en février 2011, a contribué à sa forte popularité au sein d’Orange. Au point que les syndicats se déclaraient hier partagés sur son avenir et son éventuel départ.
« Nous avons connu des présidents débarqués du jour au lendemain pour des crises diverses : financières, sociales… Nous ne souhaitons pas forcément traverser de nouveau cette période-là », déclarait ainsi Sébastien Crozier, le président de la CFE-CGC Orange (1er syndicat du groupe), sur BFM Business, alors que le conseil d’administration se tenait hier pour décider du sort du PDG.
Il poursuivait ainsi :
« Les personnels sont très reconnaissants à Stéphane Richard d’avoir été l’homme de la réconciliation sociale. […] C’est la question de la continuité qui est posée. Chacune des parties doit s’engager à prendre la décision qui fragilise le moins possible l’entreprise dans les semaines et les mois qui viennent ».
Stéphane Richard, dont le bilan est par ailleurs plus mitigé en matière d’innovation, et de conquête de nouveaux marchés, même si Orange a accru sa position en Afrique notamment, va donc quitter ses fonctions bientôt. Une décision qu’il n’a jamais entendu contester, et qui fait écho à ce qu’espérait un autre syndicat du groupe, SUD-PTT.
Ce syndicat jugeait hier, dans un communiqué que Stéphane Richard « doit dès maintenant démissionner de ses fonctions de PDG du groupe Orange ». SUD-PTT indiquait par ailleurs que son élu, représentant au conseil d’administration du groupe interviendrait en ce sens pendant la réunion qui s’est tenu hier en fin de journée. « Orange a besoin d’un nouveau souffle », précisait le syndicat.
Maintenant que les plaies sont soignées, Orange va devoir repartir en conquête.