Voilà plus de sept mois que nous attendions de le tester, le Moustache Lundi 20. À l’occasion de sa présentation officielle en novembre dernier, nous avions eu la possibilité de prendre en main, pendant quelques courtes heures, le premier vélo cargo du fabricant vosgien. Quelques kilomètres parcourus qui nous avaient clairement mis l’eau à la bouche. Rendez-vous était donc pris pour un test, en bonne et due forme, sur la version finalisée de ce premier cargo de Moustache. Le moment est arrivé de tester le Lundi 20, et après plus de 200 km parcourus au guidon du cargo (chargé ou non) nous avons bien des choses à vous dire.
Lundi 20, d’où viens-tu ?
Le point de départ du Lundi 20, il est évident, c’est le Lundi 27, le vélo urbain de Moustache, qui a été mis à jour, lui aussi, l’an dernier. Le lien de parenté est indéniable avec le vélo de ville de la marque et ce n’est pas son cintre caractéristique qui va nous démentir. D’ailleurs, le constructeur assume totalement cette filiation. Le cargo de Moustache pourrait être résumé à un Lundi 27 allongé. La formule est tout sauf anodine, elle en dit long sur le choix stratégique de la marque française. En effet, avant de concevoir son cargo, Moustache a eu le choix entre trois formats, biporteur, triporteur (avec une caisse à l’avant) ou longtail, c’est-à dire un vélo allongé où la charge est répartie à l’arrière. C’est pour ce dernier que la marque française a opté, arguant qu’il était celui qui permettait de préserver au mieux les sensations de conduite dont elle est garante.
Résultat : c’est un vélo allongé relativement classique (en dehors du guidon) auquel a abouti Moustache. D’aucuns lui trouvent de nombreuses similitudes avec le Tern GSD, un incontournable du segment, mais le Lundi 20 a son identité propre.
Un concentré de bonnes idées
La conception du Lundi 20 est un modèle du genre. Certes, Moustache n’a pas eu à aller bien loin pour trouver de l’inspiration, pour autant son cargo regorge de bonnes idées. La première d’entre elles, c’est de l’avoir fait le plus compact possible. Avec un longueur de 185 cm, il est à peine plus volumineux que le Lundi 27, le VAE de la marque. Un choix qui n’est pas sans conséquences sur la partie conduite, nous le verrons, mais aussi d’un point de vue pratique.
Plus compact, le Lundi 20 est aussi plus facile à manœuvrer et à garer. D’ailleurs sur ce dernier point, le fabricant a eu la bonne idée de placer des petits patins à l’arrière de la barre de protection, ce qui permet de garer le vélo debout. Idéal pour les petits espaces.
Ce qui rend aussi le cargo électrique de Moustache si maniable, ce sont ses petites roues de 20 pouces, qui compensent leur petit diamètre par une largeur impressionnante. Si nous étions a priori sceptiques quant à leur capacité de franchissement, mais aussi parce qu’elles plaçaient la chaîne particulièrement près du sol, force est de constater qu’à l’usage, elles ont fait disparaître tous nos doutes.
Une autre excellente idée, concerne le choix d’une selle télescopique. Concrètement, il est possible de faire varier la hauteur de selle d’une dizaine de centimètres grâce à une gâchette placée sur le cintre, près des freins. L’intérêt ? Il est double. Il permet d’une part de ne pas avoir à régler la hauteur de selle au moyen d’une clé à chaque changement de conducteur. Or, en tant que vélo familial par excellence, le cargo a vocation à passer d’un parent à l’autre régulièrement. L’autre intérêt, c’est de pouvoir poser les deux pieds fermement au sol lorsque le vélo est à l’arrêt, à un feu rouge par exemple. Lorsque le cargo est chargé, cette option permet de gagner en stabilité.
Nous avons également apprécié les petits détails liés à la protection des occupants. En effet, Moustache a mis un point d’honneur à ce que les enfants soient protégés de toutes les éventualités à l’arrière. Ainsi, aux quatre coins de la barre de protection, des excroissances métalliques permettent d’éviter les frottements. Quant à la roue arrière, elle est complètement enfermée dans un carter en plastique pour éviter, là aussi, tout contact avec les pieds des bambins.
Finalement, notre seul grief concenant la partie conception est d’ordre mécanique, et il ne s’applique pas à toutes les versions du Lundi 20. En effet, compte tenu du prix élevé du cargo, nous regrettons que la transmission Enviolo à variation continue ait été réservée aux modèles les plus chers. Sur notre modèle, nous avons bénéficié d’une transmission Shimano Deore, plutôt performante, mais on peut tout de même s’interroger sur sa capacité à bien vieillir, voire à durer compte tenu du poids du vélo et de la puissance du moteur. Pour le reste ? C’est un sans faute, et pour une première, c’est assez remarquable.
Un couple batterie sans surprise mais solide
Depuis son lancement il y a dix ans, Moustache a toujours collaboré avec Bosch pour la partie électrique de ses vélos. Il n’y a donc rien d’étonnant à constater la présence de l’accessoiriste allemand sur ce cargo. En l’occurrence, le Lundi 20 est pourvu du moteur de Bosch, le Performance Line dans sa version Cargo est un must, et sans doute le plus adapté à ce genre de vélo. Son couple de 85 Nm et ses quatre niveaux d’assistance conjugués à la transmission Shimano Deore à 10 vitesses lui offrent une grande polyvalence quel que soit le type de terrain.
Côté batterie, Moustache offre le choix sur son cargo entre un bloc de 500 Wh assez classique de Bosch ou la possibilité d’en associer deux. La batterie principale est placée sur le tube diagonal, quant à la batterie secondaire, elle vient s’ajuster à la verticale sur le tube de selle. Le fait de donner le choix est intéressant bien sûr, mais pour notre part, nous regrettons surtout que ces batteries n’aient pas été intégrées au cadre. Certes, la très grande majorité des cargos longtail font ce choix, mais sur un vélo dont le prix débute à 4 600 euros, l’intégration au minimum de la batterie du tube diagonal aurait été bienvenue.
Une assistance au point, un afficheur à améliorer
Parmi les rares griefs qui peuvent être faits à l’encontre du Lundi 20, il en est un qui concerne le choix de l’afficheur. Moustache a pris le parti d’équiper son cargo d’un écran Intuvia, l’un des plus répandus chez Bosch. Bien qu’il commence à dater, il n’est pas nécessairement un mauvais choix. En revanche, il n’est pas le plus adapté au cargo français. En effet, en dehors du fait que Bosch propose des afficheurs de meilleure qualité (plus petits, plus réactifs et dotés d’un écran couleur) à l’image du Kiox, l’Intuvia demeure un écran basique. Il n’est pas capable, par exemple, de proposer une navigation GPS. Or, du fait de son guidon si particulier, le Lundi 20, comme le 27 d’ailleurs, est difficilement compatible avec un support de smartphone. Moustache aurait dû prendre cette limitation en compte et proposer une solution incluant la navigation.
D’autant qu’une telle proposition existe bien chez Bosch et on ne peut soupçonner le fabricant français de ne pas la connaître puisqu’elle équipe son Speedbike, le Friday 27 FS. En effet, plus que l’Intuvia qui équipe le Lundi 20, c’est le Nyon que nous aurions préféré voir sur ce cargo électrique.
Enfin, une autre conséquence liée au fait d’opter pour un boîtier quelque peu daté, c’est qu’il ne dispose pas des dernières optimisations logicielles de Bosch. Ainsi, l’Intuvia n’est pas compatible avec les derniers formats de batterie, l’application Flow et n’intègre pas non plus les dernières programmations d’assistance. En effet, le Lundi 20 dispose de quatre niveaux d’assistance (Eco, Tour, Sport, Turbo) certes bien optimisés, mais pas aussi pointus que les eMTB et autres Tour+ disponibles sur d’autres modèles. Ainsi, même si l’assistance est douce et progressive, elle n’est pas aussi naturelle que sur les derniers produits de Bosch. Cela n’enlève en rien au plaisir de conduite, mais au regard du prix, le consommateur était en droit d’attendre un peu mieux.
Conduite : là où Moustache tire son épingle du jeu
Nous l’avions déjà évoqué lors de notre prise en main du Lundi 20 en novembre dernier. C’est désormais confirmé : le gros point fort du cargo de Moustache, c’est sa conduite. En effet, les choix techniques de Moustache, c’est-à-dire un vélo compact, rigide et doté de petites roues très larges, ont une conséquence directe sur la façon de manœuvrer le cargo. Celui-ci est non seulement très maniable en comparaison d’autres modèles que nous avons pu tester, mais aussi particulièrement dynamique. En la matière, le choix du fabricant de renforcer au maximum le cadre pour éviter certaines flexions de la structure habituelle chez les cargos est payant.
La faculté la plus étonnante du Lundi 20, c’est de faire oublier qu’il s’agit d’un cargo. À son guidon, ni le poids de l’ensemble ni la structure ne se font ressentir, et même chargés, nous avons l’étrange impression de manier un VAE urbain, tout ce qu’il y a de plus classique. Pas de temps d’adaptation nécessaire, pas de mouvements spécifiques, la conduite en Lundi 20 est on ne peut plus naturelle.
Niveau confort, les pneus à large section et la selle suspendue sont suffisants pour absorber la majorité des aspérités de la route. En revanche, à l’arrière, si l’on en croit la parole d’une enfant de six ans : « ça secoue un peu ». Pour autant, Les bambins ne se sont jamais sentis en danger et ont particulièrement apprécié les balades.
Même si le Lundi 20 dispose de nombreuses qualités, il nous paraît important de souligner que c’est sa capacité à faire oublier son format et le plaisir de conduite qu’il procure qui en font un cargo pas comme les autres.
Autonomie : tout dépend du poids
Soyons clairs, il paraît très difficile de se prononcer sur l’autonomie du Lundi 20. Comme pour tous les vélos électriques, plusieurs facteurs entrent en compte. Il y a bien évidemment les facteurs majeurs classiques tels que le gabarit du pilote ou le type de parcours effectué. Plus le premier est lourd, plus les batteries vont souffrir. Plus le second est vallonné, plus le moteur risque d’être sollicité. Il faut ajouter à ces deux notions évidentes d’autres facteurs tels que la température extérieure, la pression des pneus ou la cadence de pédalage. Mais sur le cargo, le facteur poids revêt une tout autre importance. En effet, que l’on roule à vide ou chargé n’a pas la même conséquence pour l’autonomie. C’est la raison pour laquelle à défaut de nous prononcer sur un score d’autonomie, nous allons vous faire part de notre expérience. En utilisant les deux batteries et en restant cantonnés au mode Turbo, nous sommes parvenus à dépasser les 150 km d’autonomie. Bien évidemment, même si ce mode est le plus tentant, il est également le plus gourmand. En mode Tour et Eco, il nous paraît tout à fait possible d’approcher des 200 km d’autonomie, si les autres conditions sont favorables.
Un mot également sur la recharge. Les batteries du Lundi 20 sont compatibles avec le système de recharge rapide « fast charge » de Bosch. Il n’est donc plus nécessaire de les laisser branchées toute la nuit, puisque le temps de recharge a été diminué par deux. Comptez un peu moins de 5 h pour une recharge complète du bloc de 500 Wh.
Fonctions cargo : du longtail pur et dur
Que vaut le Lundi 20 en tant que cargo ? Le dernier vélo électrique de Moustache doit être spécifiquement jugé sur ses capacités de portage et son comportement une fois chargé. Le fabricant basé à Épinal indique que son vélo est capable d’accepter une charge totale de 200 kg et précise que la partie arrière, renforcée par une construction en treillis, peut accepter un poids de 70 kg.
Dans notre cas, nous avons essentiellement utilisé le cargo à vide ou avec deux enfants (poids cumulé : 30 kg). Dans ces deux configurations assez classiques, le comportement du Lundi 20 n’a pas varié. Le cargo de Moustache nous a toujours semblé aussi maniable. Même lorsque nous avons chargé la mule jusqu’à 50 kg environ, sa conduite est restée simple et agréable. En définitive, ce format allongé, dit longtail, apparaît très adapté à une utilisation polyvalente. Idéal pour transporter les enfants, il ne limite pas tellement l’utilisateur lorsqu’il s’agit de transporter des courses. Certes, pour cette mission précise ou pour une utilisation professionnelle, il est moins adapté qu’un biporteur avec son caisson, mais là n’est pas l’ambition du Lundi 20.
Enfin, sur la route et notamment dans une circulation dense, le longtail est de loin le cargo le plus adapté pour rouler.
Lors de notre essai, nous avons pu bénéficier d’accessoires de qualité et adaptés, ce qui amène à une autre réflexion. L’intérêt d’un vélo cargo réside aussi et surtout dans sa capacité à exploiter les accessoires compatibles. Or ceux-ci ont un coût.
Les accessoires : le coût caché du cargo
En novembre dernier, en même temps qu’il levait le voile sur son Lundi 20, Moustache annonçait le développement de toute une gamme d’accessoires. Logique, un cargo, pour un fabricant, c’est une machine à vendre des accessoires. Fort heureusement, le Vosgien inclut de série le plus essentiel d’entre eux, la barre de protection. Celle-ci est le socle de tout l’équipement supplémentaire qui s’ajoutera par la suite. Siège enfant, siège bébé, caisses (grande ou petite), sacoches simples ou doubles… Moustache n’a pas oublié que les accessoires en cargo sont légion et, surtout, qu’ils sont indispensables si vous souhaitez profiter des capacités de votre vélo. Le fabricant a opté pour des normes très répandues, comme le MIK HD ou le format EURO (60×40). L’intérêt ? Le propriétaire du Lundi 20 ne sera pas contraint d’acheter des accessoires signés Moustache ou recommandés par lui.
Au final, en matière d’accessoires, nous vous conseillons d’être particulièrement vigilant et d’anticiper vos besoins. Car même si vous ne craquez pas pour les sacoches doubles « Greg & Manu », signées Moustache, à 169 euros l’ajout d’accessoires fera invariablement grimper la facture.
Des tarifs qui piquent
Moustache n’est pas particulièrement réputé pour avoir des tarifs agressifs. C’est même plutôt l’inverse avec un positionnement premium assumé. Le Lundi 20 n’échappe pas à la règle et se positionne comme un cargo au tarif élevé. Il existe quatre déclinaisons du cargo de Moustache, leur prix varie de 4 599 euros à 6 559 euros. La différence de prix ne se fait pas sur l’équipement « de base ». Que ce soit sur le cadre, les freins ou encore le couple batterie/moteur, chaque niveau de finition propose les mêmes spécificités techniques. Ce qui fait varier le tarif, c’est essentiellement le nombre de batteries et le type de transmission, mais dans l’absolu l’offre est plutôt claire.
La version de base (une seule batterie et la transmission Shimano Deore à 10 vitesses) pourra contenter la plupart des utilisateurs.
L’option « dual », c’est-à-dire l’ajout d’un bloc batterie de 500 Wh ne se justifie, à notre sens, que si vous êtes un très gros rouleur. En effet, les batteries sont facilement accessibles et peuvent être chargées au domicile comme au travail. À moins de faire plus de 80 km par jour, nous vous conseillons de faire cette économie de 1 000 euros. En revanche, si votre budget est extensible, un coup d’œil à la version équipée de la transmission Enviolo et du moyeu Heavy Duty à variation continue peut valoir le coup. Dans cette configuration, le passage à une courroie Gates et à une transmission plus polyvalente constitue un gain de confort certain. Son prix : 5 559 euros.