la fausse bonne idée de la rentrée ?

la fausse bonne idée de la rentrée ?


Alors que la sonnerie de la rentrée retentira dans quelques jours, la ministre de l’Éducation nationale, Élisabeth Borne, a confirmé l’arrivée d’une intelligence artificielle dédiée aux enseignants.

L’intelligence artificielle s’infiltre partout et l’école n’échappe pas à cette tendance, bien au contraire. Depuis de nombreux mois, le sujet interpelle et les élèves ne semblent pas être les seuls à se tourner vers ChatGPT et ses équivalents. Alors que les épreuves de fin d’années, tels que le bac ou le brevet, ont relancé le débat sur l’utilisation de l’IA et la difficulté de la détecter dans les copies d’étudiants, certains pays tentent de s’adapter à cette révolution. Les collégiens danois vont notamment pouvoir utiliser ChatGPT et l’IA générative pour une épreuve équivalente au brevet des collèges.

La France se montre plus restrictive sur la question, mais le gouvernement ne fait pas pour autant la sourde oreille sur ce thème. Invitée du média en ligne Brut, la ministre de l’Éducation nationale, Élisabeth Borne, a confirmé l’arrivée d’une IA pour les professeurs. « On va proposer aux professeurs une intelligence artificielle pour les accompagner dans leur métier », explique-t-elle. Mais derrière cette annonce ambitieuse, une question dérange : cette idée n’arrive-t-elle pas trop tard, dans un monde où les professeurs maîtrisent déjà des outils bien plus puissants ?

Un « cerveau auxiliaire » pour épauler les enseignants

La ministre a dessiné les contours d’un assistant à double casquette. D’une part, il s’agira d’aider les professeurs à préparer leurs cours. « Évidemment, à la fin, c’est le professeur qui doit finaliser son cours, mais l’IA servira à lui débroussailler le travail », a-t-elle précisé. Ce discours fait directement écho aux gains de productivité déjà observés dans d’autres secteurs. Une étude d’Artefact et Odoxa, réalisée en début d’année, révélait que les utilisateurs de l’IA gagnaient près d’une heure (57 minutes) par jour. Dans le cas de l’éducation, l’IA pourrait aider à ressembler des ressources de base pour laisser l’enseignant se concentrer sur la personnalisation et la pédagogie.

D’autre part, et c’est peut-être le plus prometteur, cet outil devrait permettre de mieux suivre les élèves. Selon Élisabeth Borne, il aidera à « mieux comprendre ce qu’un élève a compris et ce qu’il n’a pas compris, où sont ses blocages ».  Et la ministre d’ajouter qu’il est possible de faire de l’intelligence artificielle un « vrai levier pour faciliter l’apprentissage ».

Toutefois, elle met en garde sur son utilisation et rappelle que l’IA est « simplement un outil qu’on doit bien savoir utiliser ». « Il faut que chacun soit conscient que c’est un peu comme un cerveau auxiliaire : ça ne dispense pas de faire fonctionner son cerveau, d’apprendre à raisonner, d’apprendre à réfléchir », assure la ministre.

Un déploiement encadré : charte éthique et consultation nationale

Cette révolution technologique ne se fera pas sans garde-fous et le ministère de l’Éducation nationale travaille sur le sujet depuis plusieurs mois. Dès février dernier, Élisabeth Borne avait annoncé la publication prochaine d’une charte pour préciser « le cadre d’utilisation de l’IA à l’école », tant sur le plan pédagogique qu’administratif.

Pour s’assurer que l’outil réponde aux besoins du terrain, une vaste consultation a été lancée au premier trimestre 2025, incluant enseignants, parents d’élèves, syndicats et élèves eux-mêmes. La ligne directrice est simple : promouvoir un « usage éthique de l’IA », où la technologie soutient l’humain sans jamais s’y substituer.

Un projet souverain à 20 millions d’euros

Pour donner vie à cette ambition, le gouvernement met les moyens. Un appel à projets, financé à hauteur de 20 millions d’euros via le plan France 2030, a été lancé cet été. Le but est de développer une « IA souveraine », une solution française qui sera maîtrisée de bout en bout. Si le projet se déroule comme prévu, cette intelligence artificielle souveraine devrait être disponible dans les établissements dès l’année scolaire 2026-2027.

Une fausse bonne idée ? Le risque d’un outil déjà dépassé

Cependant, cette annonce soulève une question de fond, un brin provocatrice mais essentielle. Les enseignants, comme tous les professionnels aujourd’hui, naviguent déjà dans l’écosystème de l’intelligence artificielle. Qu’on parle de ChatGPT, de Gemini de Google ou d’autres modèles disponibles en ligne (comme NotebookLM), ils ont déjà accès à des outils puissants et polyvalents. Ils sont libres de les utiliser, d’expérimenter et d’intégrer ces technologies dans leur préparation de cours ou leur veille pédagogique.

Cerise sur le gâteau, il est même possible d’opter pour une solution française avec Mistral AI. La question se pose alors : pourquoi les enseignants iraient-ils volontairement s’enfermer dans un outil forcément plus limité, bridé et qui arrivera probablement après la bataille ? C’est là que le projet montre une certaine déconnexion avec la réalité du terrain. Les professeurs n’ont assurément pas attendu une solution officielle pour intégrer l’intelligence artificielle dans leur travail.

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Le véritable enjeu ne sera donc peut-être pas de construire un nouvel outil, mais de savoir accompagner et valoriser les compétences que les enseignants ont déjà développées par eux-mêmes. Un défi de formation et de confiance, plus que de technologie.

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